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Page:Driant-Un dirigeable au pôle Nord,1910.djvu/81

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bouleverse… me trouble… Il y a des moments où je me demande si je ne suis pas en proie à une hallucination continue et si je ne vais pas me réveiller dans ma chambre, à Verdun…

— Et vous, poursuivit-elle d’une voix chaude, que pensez-vous de cette jeune fille, que vous ne connaissez pas, qui se jette à votre tête et qui vous force à l’aimer, alors, que vous étiez à cent lieues peut-être de penser au mariage ?

— C’est vrai, fit-il, j’en étais à cent lieues, parce que je ne pouvais pas supposer que la destinée vous réservait à moi, parce que je n’aurais jamais osé songer à vous. Mais dès la première minute, à Andevanne, j’ai été sous le charme… Tenez, quand vous m’avez demandé de vous accompagner jusqu’au ravin, il m’a semblé que quelque chose allait changer dans ma vie… Et quand le ballon est parti, faut-il vous l’avouer, j’ai senti, tout au fond de moi, une joie secrète… J’allais être seul avec vous, vous sauver peut-être… Et maintenant, je bénis la destinée qui a tout arrangé ainsi…

Il s’interrompit, sonda le brouillard, et frappant à petits coups le limbe de la boussole :

— Depuis que nous sommes dans ce nuage de glace, fit-il, il y a des moments où il me semble que nous n’avançons plus…

— À quelle distance sommes-nous encore du Pôle ?

— À quatre heures du matin, nous étions à 85 degrés 28’, c’est-à-dire à 500 kilomètres. Il est sept