Page:Driant - L’invasion noire 1-Mobilisation africaine,1913.djvu/169

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Inconcevable chose que l’amour de l’homme ! Depuis qu’il vivait à côté de Nedjma, se grisant chaque jour un peu plus de sa beauté, de son charme sauvage et de cette grâce instinctive qu’il n’avait rencontrée chez aucune autre, il s’était dit pour justifier sa passion naissante que pour ses camarades, ses amis, pour Christiane elle-même, il était mort, qu’on le considérait certainement à Alger comme perdu, et qu’après une période plus ou moins longue de regrets et de larmes, il serait oublié par tous, même par elle ; il avait lu plusieurs de ces histoires où le fiancé qu’on croyait mort rentre pour constater, douloureusement, que sa place est prise ; il sentait bien qu’il était pour longtemps à la remorque du Sultan ; Sa parole l’engageait pour plusieurs années peut-être, car avec les lenteurs inhérentes au rassemblement d’une pareille multitude, que de retards dans cette marche à travers les puissances européennes coalisées ; arriverait-il jamais jusqu’à cette frontière de France où ils serait en droit de reprendre sa liberté et quelle surprise ; lui réservait cette liberté trop tardive ? L’amour de Christiane, cet amour que n’avaient pu graver bien profondément des larmes et des promesses, ne pouvait-il pas le considérer dès maintenant comme un rêve envolé ?