Page:Driant - L’invasion noire 1-Mobilisation africaine,1913.djvu/46

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à lui des ingénieurs et des banquiers chrétiens, il ouvrirait la route de Constantinople à ceux qui voulaient en chasser l’Islam.

Et s’il était tombé du pouvoir, s’il avait été obligé de quitter précipitamment Yldiz-Kiosk sous une révolution de palais préparée par l’ambassadeur anglais, c’est parce qu’il manquait d’or.

Ah ! s’il avait eu alors sous la main le centième seulement des richesses incalculables qu’Allah venait de lui envoyer, quels admirables résultats il eût obtenus !

Quelle rénovation il eût accomplie dans cette nation rendue si docile par le fatalisme ! Quelle superbe armée il eût entretenue dans ce pays qui fournit les meilleurs soldats du monde !

Avec quelle satisfaction, enfin, il eût replacé l’empire turc à son rang dans les conseils de l’Europe, et l’eût arraché à ces plénipotentiaires médecins qui, sous prétexte de guérir « l’homme malade », ne songeaient qu’a se disputer son héritage.

Dans quelles inextricables difficultés il s’était débattu, portant seul le poids du pouvoir absolu au milieu de ministres insignifiants ; mais quelle rage l’avait secoué maintes fois devant une impuissance qui grandissait chaque » jour a mesure que se creusait le déficit.

Et voilà qu’à cette heure, devant ce trésor des Mille et une Nuits, il se souvenait de tout ce qu’il avait entendu dire autour de lui ; des offres qui avaient été faites à son grand vizir, des tentatives de corruption pratiquées dans son propre palais par des ambassadeurs et des banquiers.

C’était donc vrai ; la puissance qui dominait toutes les autres était maintenant celle de l’or.

Et la moralité était tombée si bas dans cette Europe exécrée, que justice, conscience, patriotisme même, tout était à vendre.

Eh bien ! puisque tout se vendait, il avait là de quoi tout payer.

Cet or ne lui servirait pas seulement à acheter des armes et à faciliter la mise en mouvement des masses qu’il outillait pour la lutte.

Il l’emploierait encore à corrompre les conseillers des