Aller au contenu

Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/213

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il avait commencé sa carrière militaire au Cap, il y avait trente ans de cela, sous les ordres du puissant gouverneur Cécil Rhodes, le roi du Diamant ; mais il avait été renvoyé aux Indes à la suite de la guerre contre les Matabélés, cette peuplade guerrière que l’Angleterre rencontra sur sa route dans sa marche vers le Nord, et à laquelle elle chercha une querelle… d’Anglais, pour avoir un prétexte de guerre.

Il n’avait pu en effet dissimuler son sentiment de réprobation contre de tels procédés coloniaux, et dès lors son sort avait été fixé : la droiture de son caractère ne lui permettrait jamais d’occuper un de ces postes hors d’Europe où l’esprit d’intrigue et la duplicité constituent les principales qualités exigées par la Grande-Bretagne.

S’il eût su, comme tant d’autres, ériger la fourberie à hauteur d’un principe, il fût peut-être devenu un Baring ou un Cromer ; mais il finissait sa carrière comme chef de poste militaire sur une île de deux kilomètres de tour avec le grade de colonel.

Depuis vingt heures, sir Collington répondait de son mieux au bombardement de la flotte turque, et le bras qu’il portait en écharpe et qu’avait éraflé un éclat d’obus-fusée prouvait qu’il avait vaillamment payé de sa personne.

Mais on était tellement loin de s’attendre, dans un poste comme celui-là, à une attaque munie de pièces de marine et à un bombardement en règle, que le fort et ses batteries avaient beaucoup souffert ; bien que ses parapets de seize mètres d’épaisseur fussent recouverts d’une couche de béton calculée d’après les effets les plus récents de l’artillerie de côte, une énorme brèche était ouverte dans le front nord le plus exposé, car la flotte turque était munie des nouveaux engins préconisés à bord des bâtiments depuis quelques années, engins qui consistaient en un formidable projectile lancé sans canon d’après le principe des fusées de guerre.

Cinq de ces monstres d’acier, arrivant sous un angle de 35 degrés sur le rempart, et y faisant détoner une charge de 600 kilogrammes de pyroxiline avaient ébranlé le roc et remplacé la masse couvrante par de véritables entonnoirs.

La garnison de 300 hommes du fort de Périm était déjà réduite de moitié par le feu de l’ennemi ce qui restait d’hommes valides sur pied avait passé la nuit à combler la