sultane, entourée de serviteurs muets, dans un de ces palais merveilleux dont elle avait vu des reproductions à l’Opéra, dans l’Africaine, et cette extraordinaire fortune l’éblouissait.
Aussi, après avoir accueilli facilement les hommages assez pressants du jeune officier de marine, qui trouvait dans ce passe-temps un charme tout particulier, lui avait-elle montré une froideur significative ; elle était d’ailleurs encouragée dans cette attitude par miss Clipott. dont le rigorisme lui était connu et devant laquelle on ne pouvait hasarder la moindre inconvenance sans provoquer de farouches froncements de sourcils.
La vieille Anglaise partageait d’ailleurs toutes les brillantes illusions de sa maitresse : elle aussi aurait une petite cour dans ce palais entrevu à l’horizon ; et peut-être, la guerre finie et le gouvernement du Sultan triomphant, pourrait-elle faire entendre dans les conseils du prince Omar quelques avis autorisés. Ignorant absolument la condition des femmes dans la vie musulmane, surtout de celles qui, de gré ou de force, ont conservé leur virginité jusqu’à un âge respectable, elle se voyait déjà dotée de sa part d’influence et en usant pour propager autour d’elle quelques-uns des saints principes de « l’Armée du Salut ». Tel était l’état d’âme de ces deux estimables personnes au début de l’expédition. Il allait se modifier sérieusement avec la longue attente et plus tard les événements se chargeraient de le transformer radicalement.
Elles n’étaient pas les seules sur cet aérostat à poursuivre une idée fixe. M. de Brantane était plus que tout autre obsédé par une pensée unique, celle de retrouver Saladin, et pendant les quinze premiers jours de l’exploration, il ne quitta guère sa jumelle, s’attendant à tout moment à voir apparaître le Tzar à l’horizon.
Dès qu’un aérostat était signalé, il ne laissait à personne le soin de lui faire à l’aide de pavillons les signaux de reconnaissance convenus. Ces pavillons évoluaient sous la nacelle, le long d’un gros câble, et on les manœuvrait du bord comme on manœuvre les leviers d’un sémaphore à l’entrée des ports.
Si l’aérostat aperçu ne répondait pas de suite, vite, le cap était mis de son coté, et, en quelques bonds de vaste enver-