tirer de lui… et moi aussi je rêve un châtiment inoubliable… Vous le voyez, notre objectif est le même… Voulez-vous de moi, de nous plutôt ? car mon ami Zahner ne me pardonnerait pas de lui faire manquer ce voyage dont nous avons déjà parlé.
— Mais, avec enthousiasme ! s’écria le jeune homme ; je n’aurais jamais osé vous le proposer, mais vous devez vous douter combien je serai heureux et flatté de vous avoir à bord.
— Ainsi, dans trois jours.
— Oui.
— Et à quelle heure le départ ?
— A quatre heures du soir.
— L’endroit ?
— L’entrée du large pont qui va du palais des Champs-Élysées aux Invalides.
— J’y serai, ou plutôt nous y serons ; si nous sommes trois ou quatre au lieu d’être deux seulement, vous pourrez nous enlever quand même ?
— Certes ; j’ai 22.000 kilogrammes de lest : quelques saumons de plomb à enlever et tout est dit.
— Et maintenant, dit de Melval en remontant en voiture, je sens que je suis plus calme. Cette expédition ne durera peut-être pas longtemps mais elle était nécessaire pour servir de transition entre le passé et le présent… Je vous suis.
Plus calme, il ne le fut pas longtemps ; quand la voiture s’arrêta de nouveau, cette fois devant l’hôtel de M. Fortier, il sentit son cœur bondir dans sa poitrine, sa vue s’obscurcit et ce fut en tâtonnant qu’il monta l’escalier.
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Cependant, depuis midi, dans le coquet hôtel du boulevard Haussmann, Christiane Fortier allait fiévreusement de son fauteuil au balcon et, pâle sous ses bandeaux noirs, elle attendait.
Toute vêtue de blanc, sans un bijou, une simple marguerite dans les cheveux, elle était idéale de grâce et rayonnante de beauté.
Elle attendait celui qu’elle n’avait jamais cru mort, dont une secrète intuition lui avait toujours fait espérer le retour.