Page:Drieu La Rochelle - Les Chiens de paille, 1964.djvu/189

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— On verra, fit d’un air entendu Salis.

— C’est tout vu, interjeta Susini. Vous allez agir aussi légèrement que ce jeune homme. Il y a une chose que vous oubliez depuis deux heures, c’est que vous êtes chez moi.

— Vous savez que je n’ai pas le respect de la propriété.

— Mais vous devez avoir le respect des pactes. Je vous ai rendu des services, cela se paie. C’est le moment de payer : je ne veux pas d’histoires… Et d’abord, pourquoi diable voulez-vous kidnapper ce garçon ? À quoi ça vous avancera ?

— Ça me regarde.

— Ça me regarde aussi, il me semble.

— C’est à prendre ou à laisser.

Susini avait laissé de côté son sourire depuis longtemps. Il posa son fume-cigarette sur la cheminée.

— Vous n’allez pas commencer ce vilain petit jeu avec moi ?

Salis alla à la porte, sans plus répondre, l’ouvrit et siffla. Les deux hommes entrèrent.

— Nous emmenons celui-là.

Cormont, dont on s’approchait regarda Roxane, puis Constant sans mot dire. Sans doute les soupçonnait-il tous les deux de l’avoir trahi. Mais il semblait se dire qu’il n’avait qu’à s’en prendre à lui-même. Il dit en ricanant à Susini :

— Évidemment, là où il y a du marché noir…

— Taisez-vous donc, mon garçon. Salis, encore une fois, vous aurez de beaucoup plus gros ennuis que moi.

— Je vous engage à rester bouche cousue. Vous