à Alain, en lui parlant de risque. Et lui plaire, c’était le dominer, puisque c’était le tromper. Toute la vie pour Urcel était dans cet enchaînement : il ne pouvait que tromper, puisqu’il n’était jamais lui-même, mais tromper un être lui donnait la sensation de le posséder.
Pourtant, Alain lui éclatait de rire au nez.
— Le risque ! Il y a drogue et drogue. Votre opium, c’est assez tranquille.
— Avec ou sans drogue, tout être qui a une vraie sensibilité se tient à la limite de la mort et de la folie.
— Vous ne mourez pas.
— Croyez-vous ?
Alain réprima un sourire trop insolent. Chez Urcel, dans le cas où il se sentait près d’être percé à jour, l’impudence devenait une audace.
— Je me suis toujours senti dans ce monde et dans un autre, lança-t-il tout de go.
— Non ! Dans un autre ! Comment peut-on être dans deux endroits à la fois ?
— Ça ne vous est jamais arrivé ?
Alain eut une moue tout à fait dégoûtée.
— J’ai cru ça autrefois, quand je me soûlais avec des mots, mais c’était une affreuse blague. Rien ne bouge.
— Le croyez-vous ? s’écria Urcel avec indignation.
— Je le crois.
Urcel voulait sauver le prestige poétique de la drogue.