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Liquéfaction des principes, difficulté de l’observation des phénomènes économiques, ce sont là des obstacles qui ne doivent pas arrêter les efforts généreux et plutôt les provoquer, mais dont il faut avant tout se rendre maîtres.

S’il en résulte que la philosophie de la solidarité n’existe encore qu’à l’état d’essai, elle n’est pas moins digne de nous séduire par la grandeur et la noblesse de ses aperçus. Elle n’est peut-être, pour le moment, qu’une manière de penser, ainsi qu’on l’a dit modestement ; mais n’est-ce donc rien, quand cette manière se rattache par des liens intimes et étroits à cette formule féconde de la morale de Kant : « Agis de telle façon que tu traites l’humanité, aussi bien dans ta personne que dans celle d’autrui, toujours comme une fin, jamais comme un moyen » ?

Elle est une protestation mesurée mais énergique contre ces doctrines d’un optimisme ironique qui confient au seul intérêt le gouvernement du monde, à celles qui ne voient dans la vie que

Le grand combat pourvoyeur du désir,
Que l’espèce à l’espèce, avec âpreté, livre.

Elle est dans le magnifique poème de Justice la glorification de la cité, élite, somme et nœud des forces de la nature,

Libre concert de bras et d’esprits travailleurs.


Elle proclame que le respect de tout homme est la justice même.

« La justice, a-t-on dit encore, s’apprend et s’oublie comme la géométrie. » N’est-ce rien d’en cultiver