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Page:Drumont - La France Juive édition populaire, Palmé 1885.djvu/233

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hélas ! les conditions ridicules dans lesquelles le combat fut engagé par des êtres pusillanimes qui, après avoir mis leur épingle au jeu sans trop savoir pourquoi, n’étaient préoccupés que de la retirer ?

Des deux chefs du Seize-Mai, le plus disposé à sacrifier sa vie eût été certainement le duc de Broglie ; mais il était gêné par les habitudes d’un tempérament tout littéraire, par cette perpétuelle hésitation d’esprit qui rend les hommes d’une certaine école politique impropres à toute détermination virile.

Fourtou, pur Gascon, vrai capitan de comédie, était, avec plus de rouerie, le modèle du Sulpice Vaudrey de Monsieur le Ministre de Jules Claretie, le provincial corrompu par la vie de Paris : il ne profita de son passage au ministère que pour « s’en fourrer jusque-là ».

Le duc de Broglie était timoré comme un parlementaire, l’autre, poltron comme la lune ; le premier avait peur d’endommager sa doctrine, le second tremblait de compromettre sa peau[1].

Toutes les fois qu’il fallut agir ou qu’on leur proposa d’agir pour eux, les hommes du Seize-Mai reculèrent, comme avaient reculé ceux du Vingt-Quatre-Mai.

Raoul Duval, dont on connaissait l’énergie, aurait consenti, au 24 mai, à se charger du portefeuille de l’Intérieur. Il ne demandait qu’à être autorisé à arrêter six

  1. Ce ministre si mou qui, avec la puissante machine de la centralisation à sa disposition, croyait aller jusqu’aux dernières limites de l’audace en interdisant la vente du Petit Journal dans les gares, se retrouvait à la tribune ; il répondait très fièrement aux menaces de la gauche victorieuse : « Si j’avais fait tout mon devoir, vous ne seriez pas ici. » Ce n’est pas un des moindres inconvénients du système parlementaire, que de donner la direction des affaires à des hommes qui n’ont qu’un courage tout verbal, qui s’imaginent, selon le mot de Guizot « avoir agi quand ils ont parlé. »