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le juif dans l’histoire de france

porte à croire qu’il était chargé de me sonder ou de connaître mon avis. Il eut soin, comme préambule, de me demander le secret le plus absolu sur notre conversation, et me raconta ensuite longuement ses derniers entretiens avec Bismarck et les dispositions où il avait trouvé celui-ci.

Le ministre, me dit M. B…, désire la paix plus ardemment que jamais ; il fera tout son possible pour la conserver ; il est d’autant plus sincère en s’exprimant ainsi qu’il explique lui-même pourquoi le Nord ne peut ni ne doit désirer aujourd’hui l’annexion des États du Sud ; que l’unité de l’Allemagne se fera tout naturellement d’elle-même, tôt ou tard, et que sa mission à lui, Bismarck, n’est pas d’en hâter le moment, mais bien de consolider l’œuvre de 1866, etc., etc. De tous côtés, on se demande s’il n’existe aucun moyen de rétablir la confiance entre la France et la Prusse, aucun moyen de rassurer les esprits en Europe et faire cesser cette affligeante stagnation des affaires. Une entrevue de l’Empereur avec le roi Guillaume serait regardée par beaucoup de gens comme le moyen le plus efficace d’atteindre ces résultats. Il en a été question à Varzin, et les personnes de l’entourage de Bismarck cherchent à connaître son avis sur la possibilité d’une telle entrevue. Ses intimes m’ont dit qu’il serait enchanté qu’elle pût avoir lieu, mais il ne se dissimule pas que, pour y amener l’Empereur, il serait nécessaire que lui (Bismarck) et le roi s’engageassent à donner des garanties sérieuses, nettement exprimées (par écrit, me disait le banquier), celle de ne rien entreprendre en vue d’arriver à une union avec le Sud. En fin de compte, M. B… m’a demandé ce que je pensais des dispositions de l’Empereur à accepter ou à refuser une entrevue avec de telles garanties données[1].

La confiance de tout ce monde vis-à-vis du Juif était inimaginable. Savez-vous à qui le colonel Stoffel, qui cependant connaît les Juifs, s’adressait pour faire parvenir aux Tuileries ses dépêches secrètes ? au Juif prussien Bleichrœder.

  1. Papiers et correspondance de la famille impériale.