Page:Drumont - La France juive, tome premier, 3eme édition, 1886.djvu/461

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du temps, il se pelotonne dans son drapeau[1], comme nous nous pelotonnons dans nos draps quand on vient nous chercher à l’aube, l’hiver, pour une corvée ennuyeuse. Dès qu’il a reculé, il se raisonne, il se ramène lui-même.

À ce manque de déterminisme, il faut, pour demeurer dans l’analyse vivante, joindre l’intervention toute naturelle de la comtesse de Chambord. Laissez de côté toutes les phrases, restez dans la simple humanité, et figurez-vous ce que devait éprouver cette femme dévouée lorsqu’elle voyait son mari, heureux près d’elle, faisant la charité, chassant, mangeant bien et qu’elle se disait : « Demain, tout ce bonheur sera remplacé par des machines infernales, des coups de pistolet, des émeutes. »

— Je suis revenue une fois, disait souvent la duchesse

  1. Il n’est point douteux maintenant, pour tout homme de bonne foi, que la question du drapeau n’ait été qu’un prétexte. A l’Assemblée de Bordeaux, quelques députés orléanistes s’adressèrent à M. de la Ferté, qu’ils savaient muni des pleins pouvoirs du comte de Chambord, et lui demandèrent si la question du drapeau serait un obstacle. M. de la Ferté répondit qu’il était autorisé à affirmer que cette question ne ferait pas de difficulté, il ajouta que, dans son opinion, il lui semblait impossible de ne pas maintenir le drapeau tricolore que les malheurs de la dernière guerre venaient de rendre sacré.
        Le 29 ou le 30 juin 1871, M. Bocher rencontra dans la salle à manger des Réservoirs trois députés légitimistes : le duc de La Rochefoucauld-Bisaccia, le comte Armand de Maillé et le vicomte de Gontaut-Giron, il leur demanda quel était le sens de la lettre que le comte de Paris venait de recevoir : « Il me tarde de vous serrer sur mon cœur, mais la délicatesse m’oblige à vous prier d’attendre que je me sois expliqué avec le pays sur les questions réservées. » Ces messieurs déclarèrent qu’ils n’y comprenaient rien et qu’il n’y avait pas « de questions réservées. » Quoiqu’il fût près de minuit à la fin de l’entretient, on courut chez M. de la Ferté, on le fit lever, on lui expliqua ce dont il s’agissait, il se troubla, pâlit et dit : « je suis désavoué, ce doit être la question du drapeau ! »