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Page:Du Bellay - Œuvres complètes, édition Séché, tome 3.djvu/115

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Que ceste autre Pallas, ornement de nostre âge ?

Ainsi jusqu’aujourd’huy, ainsi encor' voit-on
Estre tant renommé le maistre de Platon,
Pour ce qu’il eut d’un dieu la voix pour tesmoignage.

CLXVIII

Nature à vostre naistre heureusement feconde,
Prodigue, vous donna tout son plus et son mieux,
Soit ceste grand' douceur qui luit dedans vos yeux,
Soit ceste majesté disertement faconde.

Vostre rare vertu, qui n’a point de seconde,
Et vostre esprit ailé, qui voisine les cieux,
Vous ont donné le lieu le plus prochain des Dieux,
Et la plus grand’ faveur du plus grand Roy du monde.

Bref, vous avez tout seul tout ce qu’on peut avoir
De richesse, d’honneur, de grace, et de sçavoir :
Que voulez-vous donc plus esperer d’avantage ?

Le libre jugement de la posterité,
Qui, encor' qu’ell' assigne au ciel vostre partage,
Ne vous donnera pas ce qu’avez merité.

CLXIX

La fortune, Prelat, nous voulant faire voir
Ce qu’elle peut sur nous, a choisi de notre âge
Celuy qui de vertu, d’esprit, et de courage
S’estoit le mieux armé encontre son pouvoir.

Mais la vertu qui n’est apprise à s’esmouvoir,
Non plus que le rocher se meut contre l’orage,
Dontera la fortune, et contre son outrage
De tout ce qui luy faut, se sçaura bien pourvoir.

Comme ceste vertu immuable demeure,
Ainsi le cours du ciel se change d’heure en heure.
Aidez-vous donq, Seigneur, de vous mesme au besoin,

Et joyeux attendez la saison plus prospere,
Qui vous doit ramener vostre oncle et vostre frere :
Car et d’eux et de vous le ciel a pris le soin.