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Page:Du Bellay - Œuvres complètes, édition Séché, tome 3.djvu/70

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LXIII

Quel est celuy qui veut faire croire de soy
Qu’il est fidele ami, mais quand le temps se change,
Du costé des plus forts soudainement se range,
Et du costé de ceux qui ont le mieux de quoy ?

Quel est celuy qui dit qu’il gouverne le Roy ?
J’entens quand il se voit en un pays estrange,
Et bien loin de la Court : quel homme est-ce, Lestrange ?
Lestrange, entre nous deux, je te pry dy le moy.

Dy moy, quel est celuy qui si bien se deguise
Qu’il semble homme de guerre entre les gens d’Eglise,
Et entre gens de guerre aux prestres est pareil ?

Je ne sçay pas son nom ; mais quiconqu’il puisse estre
Il n’est fidele ami, ni mignon de son maistre,
Ni vaillant chevalier, ni homme de conseil.

LXIV

Nature est aux bastards volontiers favorable,
Et souvent les bastards sont les plus genereux,
Pour estre au jeu d’amour l’homme plus vigoureux,
D’autant que le plaisir luy est plus aggreable.

Le donteur de Meduse, Hercule l’indontable,
Le vainqueur Indien, et les Jumeaux heureux,
Et tous ces Dieux bastards jadis si valeureux,
Ce probleme (Bizet) font plus que veritable.

Et combien voyons nous aujourd’huy de bastards,
Soit en l’art d’Apollon, soit en celuy de Mars,
Exceller ceux qui sont de race legitime ?

Bref tousjours ces bastards sont de gentil esprit :
Mais ce bastard (Bizet) que lon nous a descrit
Est cause que je fais des autres moins d’estime.

LXV

Tu ne crains la fureur de ma plume animee,
Pensant que je n’ay rien à dire contre toy,
Sinon ce que ta rage a vomy contre moy,
Grinçant comme un mastin la dent envenimee.