au cours, qui sembloit lent :
Amour aussi m’est humble, et violent,
Quand le coral de voz levres je baise.
L’eau goute à goute anime la fournaize
D’un feu couvert le plus etincelant :
L’ardent desir, que mon cœur va celant,
Par voz baisers se faict plus chault que braize.
D’un grand traict d’eau, qui freschement distile,
Souvent la fievre est etainte, Madame.
L’onde à grand flot rent la flamme inutile.
Mais, ô baisers, delices de mon ame !
Vous ne pouriez, et fussiez vous cent mile,
Guerir ma fievre, ou eteindre ma flamme.
XLV
Ores qu’en l’air le grand Dieu du tonnerre
Se rue au seing de son epouse amée,
Et que de fleurs la nature semée
A faict le ciel amoureux de la terre.
Or’que des ventz le gouverneur desserre
Le doux Zephire, et la forest armée
Voit par l’épaiz de sa neuve ramée
Maint libre oiseau, qui de tous coutez erre :
Je vois faisant un cry non entendu
Entre les fleurs du sang amoureux nées,
Pasle, dessoubz l’arbre pasle etendu :
Et de son fruict amer me repaissant,
Aux plus beaux jours de mes verdes années
Un triste hiver sen’en moy renaissant.