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LE DÉPÔT.

à la pistole avec les femmes des sergents de ville incarcérées.

M. Veysset avait été inscrit sur le registre du Dépôt avec le prénom de Jean ; en réalité, il se nommait Georges. Chargé pendant le siège d’une partie de l'approvisionnement de Paris, il avait entretenu de fréquentes relations avec les membres du gouvernement de la Défense nationale, relations que l’armistice et la paix n’avaient point brisées. Il rêva de devenir, après le 18 mars, l’intermédiaire entre la Commune et le gouvernement de Versailles, de façon à éviter la lutte que l’on redoutait et à remettre Paris à des mains légitimes. Le gouvernement régulier ne repoussa point ses offres et l’engagea à poursuivre l’accomplissement de son projet. Il avait été question d’abord d’opérer une diversion dans Paris ; plusieurs chefs militaires de la Commune furent tâtés, ne se montrèrent pas trop rebelles, et peut-être aurait-on essayé d’atteindre de cette façon un résultat sérieux, lorsque le gouvernement de Versailles, modifiant ses intentions premières, engagea Georges Veysset à pratiquer un chef de troupes fédérées et à obtenir l’abandon d’une ou de deux portes de l’enceinte fortifiée.

Pour mieux déjouer les recherches de la police, où M. Veysset n’ignorait pas que Raoul Rigault excellait, il avait sept appartements différents à sa disposition. Il changeait donc constamment de domicile, mais les conciliabules les plus importants se tenaient ordinairement rue de Madrid, n° 29, ou rue de Douai, n° 3. C'était un homme habile, généreux comme ceux qui savent payer les consciences, et qui rendit à l’armée française le service d’acheter les batteries de Montmartre. Pour bien lui prouver que le marché était loyal, on encloua les pièces de canon sous ses yeux ; il versa la somme convenue : 10000 fr. Le 14 mai, les