Page:Du Camp - Les Convulsions de Paris, tome 1.djvu/198

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
176
LA SANTÉ.

disciplinaire du ixe secteur, ramené chez Léo Meillet, repris par la foule et reporté pour ainsi dire à la geôle du secteur. Léo Meillet[1], qui fit de sincères efforts pour sauver les généraux et leurs officiers, savait bien qu’ils n’étaient point en sûreté dans cette prison rudimentaire, sans grilles ni murailles, que l’on avait tant bien que mal installée boulevard d’Italie ; il voulait donner aux prisonniers la sécurité d’une véritable maison pénitentiaire, et il ordonna de les transférer à la Santé. La voiture où il les fit monter, pour les arracher aux insultes populaires, fut brisée. Tous les curieux accourus devinrent une foule atteinte de frénésie. Au milieu de quelles insultes et de quels traitements quatre officiers irréprochables arrivèrent à la prison, nous l’avons dit.

Le Comité central, instruit des faits qui s’étaient produits, déclara que c’était un malentendu et que les généraux devaient être remis en liberté. C’était fort bien ; mais on comptait sans les fédérés du ixe secteur, qui, se sachant les maîtres sur leur territoire, ne reconnaissaient d’autre autorité que la leur, et, tenant à leur proie, étaient résolus à ne la point lâcher. Le soir même on en eut la preuve. À neuf heures, deux personnes, qui ne dirent pas leur nom et qui étaient le général Cremer et M. Arronshon, se présentèrent chez M. Lefébure, porteurs d’un ordre signé : Lullier, général en chef, et enjoignant au directeur de la Santé de relaxer immédiatement M. Chanzy. C’était péremptoire ; ordre d’arrestation signé du général Duval, ordre de mise en liberté signé du général Lullier, cela se valait.

M. Lefébure ne demandait pas mieux que d’obéir ;

  1. M. Edmond Turquet, député, arrêté en même temps que le général Chanzy, fut sauvé par Léo Meillet ; après la défaite de la Commune, M. Turquet n’oublia pas le service qui lui avait été rendu ; il donna asile à Léo Meillet, et lui procura les moyens de quitter la France.