Page:Du Camp - Paris, tome 4.djvu/168

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n’est-il pas permis d’y vendre de la laine en écheveau et du fil ? Craint-on que les convalescentes ne travaillent pour leur propre compte, et ne devrait-on pas plutôt les y encourager, car peut-être pourraient-elles gagner quelques sous qui les aideraient à vivre lorsqu’elles sortiront de l’hôpital ?

C’est généralement sur les préaux ou sur les cours, dans des corps de logis situés au rez-de-chaussée, que s’ouvrent la pharmacie, les magasins, les celliers, les cuisines. Celles-ci sont toujours très-amples, sablées de sable jaune, très-claires et baignées dans une atmosphère insupportable de chaleur. Les vases de cuivre bouillonnant sur le fourneau noir reluisent comme de la vaisselle d’or ; les marmites portatives à compartiments sont rangées sur des étagères, chacune devant une étiquette portant le nom de la salle qu’elle doit desservir. La nourriture est très-saine : de la viande, du poisson frais, des légumes, du bouillon qui m’a paru savoureux. Les malades, selon leur état sanitaire, ont une part, deux, trois et même quatre parts ; c’est là qu’on s’arrête, car c’est la pitance d’un homme bien portant. Dans les hôpitaux, comme dans les prisons, comme dans tous les grands établissements où la cuisine est située loin du lieu de distribution des vivres, où il faut monter des escaliers, traverser des corridors et diviser préalablement la nourriture avant de la donner à ceux qui l’attendent, on mange froid, ou, ce qui vaut encore moins, refroidi ; la graisse est à demi figée, la viande a perdu de sa saveur et la friture du poisson est déjà flétrie. C’est un inconvénient auquel il serait possible de remédier, en employant au transport des cantines contenant les vivres ces boites intérieurement capitonnées qu’on nomme des cuisines norvégiennes et qui facilement conservent pendant plusieurs heures aux aliments une chaleur de soixante degrés.