encore, n’y a-t-il pas de quoi désespérer ? C’est vers ce vieux troupeau qui a laissé sa laine à toutes les épines du chemin, c’est vers ces brebis dénudées, surmenées, fourbues, tombées sans force au seuil de la mort que le bon pasteur doit venir ; c’est à ces pauvres pécheresses si cruellement punies déjà qu’il faut, plus qu’à tout autre, faire entendre des paroles de douceur, d’espérance et de commisération. On semble n’avoir pas compris que la peur du diable est le contraire de l’amour de Dieu, et il est à craindre qu’on ne trouble beaucoup ces faibles têtes avec des pratiques religieuses exagérées. Les indigentes sont divisées en neuf congrégations, qui sont la congrégation du Saint-Sacrement, du Sacré-Cœur, de la Sainte-Vierge, de Sainte-Geneviève, de Saint-Vincent de Paul, du Rosaire-Vivant, de la Sainte-Enfance, de la Propagation de la foi et des Âmes du purgatoire. Ce choix est fort habile, surtout en ce qui concerne les trois dernières congrégations.
C’est un grand honneur, fort recherché, d’appartenir à ces sortes de confréries ; on n’y est pas toujours admis d’emblée, et il s’est présenté tel cas où la puissance ecclésiastique a fait appel aux usages du pouvoir séculier. Une fois on a consulté le suffrage universel et fait un véritable plébiscite pour savoir si une pensionnaire désignée était digne d’être reçue membre d’une des congrégations. On peut juger quel remue-ménage dans tout l’hospice, et combien ces procédés, puérils en eux-mêmes, cruels pour la malheureuse qui en est l’objet, sont de nature à détruire le calme dont ces femmes ont avant tout besoin. Au jour de la Fête-Dieu, après la messe, j’ai vu défiler toutes ces congrégations, distinguées les unes des autres par des cordons de différentes couleurs portés en sautoir et par des bannières d’une extrême richesse, que ces malheureuses ont payées de leur pauvre argent. Il est difficile de voir passer la con-