Page:Du Camp - Paris, tome 4.djvu/365

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avoir été faite « pour le plaisir des yeux », ainsi que l’on disait au dix-huitième siècle. En face se développe la forêt de Sainte-Geneviève, où mademoiselle de Fontange, accompagnant Louis XIV à la chasse, entoura son front du ruban qui devait la rendre immortelle dans un pays où la mode domine tout ; à gauche, des pentes boisées descendent vers les prairies qui vont jusqu’à Épinay ; à droite, la vieille seigneurie que Hugues Capet donna en 991 à Thibaud File-Étoupe, Montlhéry, dresse son donjon lézardé sur la colline et regarde les champs où se livra entre Louis XI et le comte de Charolais la plus étrange bataille dont l’histoire ait gardé le souvenir, car tout le monde se sauva, et chacun chanta victoire. L’air est pur et fortifiant ; un fait vraiment exceptionnel le prouve : l’asile, qui fut inauguré le 23 janvier 1869, est resté cinq mois et demi sans avoir un seul décès à constater sur une population moyenne de 600 individus.

À l’établissement sont annexés un moulin et une ferme exploités par les malades. J’ai vu passer les travailleurs ; ils s’en allaient vêtus de leur bon costume d’été en toile bleue rayée de blanc, la tête abritée par un large chapeau de latanier, portant sur l’épaule les houes, les louchets, les râteaux et les faux ; d’amples bidons de café noir mêlé d’eau très-légèrement alcoolisée les accompagnaient sur une petite charrette et devaient leur permettre de se désaltérer pendant les instants de forte chaleur. Des ateliers pour le charronnage, la forge, la cordonnerie, la menuiserie, la confection des vêtements, sont occupés par les malades, dont on obtient sans peine un travail suffisant pour subvenir aux besoins de la maison. On est toujours surpris de voir confier des outils, des instruments tranchants à des fous qui subitement peuvent devenir dangereux et les employer à des actions mauvaises. Il n’est pas sans