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LE CRITIQUE.

de 1837, avec une vivacité qui démontre la sincérité de ses convictions, il attaqua l’art bourgeois, l’art « pot-au-feu » comme l’on disait alors, où Drolling, avec ses chaudrons bien étamés, Mallebranche avec ses effets de neige, Louis Ducis avec ses troubadours, avaient trouvé quelque renom. Voulant frapper a la tête, il s’en prit à Paul Delaroche, déjà célèbre et fort admiré pour les Enfants d’Édouard (1831), Richelieu sur le Rhône, Mazarin mourant, Cromwell (1832), Jane Grey (1834). À propos de Charles Ier insulté par des soldats dans un corps de garde, il le traita avec une sévérité qui fut excessive. Tout en reconnaissant que les sujets fort habilement choisis par Paul Delaroche déterminaient son succès, bien plus que l’art avec lequel ils étaient traités ; tout en admettant que l’aspiration ne s’élève pas au-dessus de terre et que la simple reproduction d’un fait d’histoire ne constitue pas la peinture historique, on peut convenir que les qualités, souvent froides, il est vrai, et parfois un peu ternes de l’artiste, méritaient d’être moins durement appréciées. La chaleur du combat n’était pas éteinte, c’est là une excuse ; on se gourmait encore au nom de l’École romantique, repoussée sans réserve par l’Académie des beaux-arts, et qui ne faisait que bien difficilement sa trouée aux Salons annuels que l’on semblait vouloir lui fermer de parti pris. Si la critique de Théophile Gautier a dépassé la mesure en cette circonstance, il est juste de rappeler qu’il était le champion d’une cause que l’on combattait à outrance, que ses adversaires étaient