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Page:Du Flot - Les mœurs du tigre, récit de chasse, 1886.djvu/16

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cheval ne pouvait me laisser la sûreté de main indispensable en pareil cas.

L’impassible Steadman s’aperçut de mon embarras. Il me cria du haut de son éléphant :

— Quittez les arçons, Will, my dear. La vilaine bête vous regarde. Quittez, quittez vite, mon ami.

J’étais déjà à pied. Il était temps.

Prompt comme la foudre, le bâgh venait de prendre son élan, et, passant par dessus la bande des chiens, il avait renversé un homme sous le choc et venait de tomber sur la croupe de Gold-dress.

Le pauvre animal poussa un hennissement sauvage et fléchit sur l’arrière. Heureusement qu’il en fut quitte pour ce premier et unique assaut. Le tigre, qui cherchait l’homme apparemment, dépité de m’avoir manqué, revint en arrière d’un bond égal à celui qui l’avait porté là, et se retrouva pris dans le demi-cercle. J’en profitai pour me hisser dans le howdah de Steadman, laissant mon cheval s’enfuir à travers les champs.

Trois coups de feu éclatèrent. Aucune balle n’atteignit le félin. On entendit la voix du lieutenant Blake :

Get up the bull-dogs ! (Lâchez les bouledogues).

Et nous vîmes les deux vaillantes bêtes se ruer, avec un aboiement de rage, sur le fauve, qui ne prit point garde à leur attaque.

De fait, Blake eut raison, mais pas pour longtemps. L’un des chiens coiffa le tigre à l’oreille gauche avec une audace incroyable. Surpris, celui-ci décrivit une parabole effrayante et, prenant de la