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LE RECTEUR DE L’ÎLE DE HOUAT


La mer était déjà grosse vers le milieu de la nuit. Les hautes lames du large arrivaient de temps en temps à la côte et pouvaient faire présager une tempête. Aussi le misérable évadé commençait-il à s’inquiéter.

— Que faire ? se disait-il, mille bombes ! Dire qu’il ne passera pas une chaloupe à la pointe. Pourtant, il doit être bientôt trois heures du matin, et d’ordinaire les bateaux de Belle-Île doublent la pointe de Houat… Ah ! ah ! quel tour je leur ai joué ! Hein ? on dira : C’est drôle, le Nantais s’est envolé comme un goëland, par le toit de la cambuse… N’importe, m’est avis qu’il serait temps de filer… Mille millions de diables ! Hein ? qu’est-ce que c’est ?… les lames qui clapotent apparemment… Mais non, tonnerre ! c’est un bruit d’avirons… oui, ça rapproche… Ohé, ohé, là-bas !

— Ohé ! répondit une voix sur la mer : que voulez-vous ?

— Passage à bord, camarades.

— Impossible de doubler le cap.

— C’est que vous avez pris un mauvais bord. Virez tout de suite ; laissez courir un demi-mille au large et arrivez ; le remous vous portera tout seul dans l’anse au-dessous de la pointe.

— C’est bon, camarade ; il paraît que vous vous y connaissez.

— Un peu, garçons. Allons, y êtes-vous ? Larguez la misaine et revenez au plus près ; quand je serai à bord, je vous tirerai de presse.

Le bruit des houles et l’éloignement ne permirent pas aux passagers de saisir tout ce que Corfmat avait