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LE RECTEUR DE L’ÎLE DE HOUAT


Au moment où M. Tanguy arrivait sur la falaise, on venait d’entendre au large le premier coup de mousquet tiré de la chaloupe en détresse. La mer était si grosse, les lames si hautes, qu’on n’apercevait pas encore le petit bâtiment perdu au milieu du brouillard et de l’écume des flots. Plusieurs coups de feu retentirent ensuite, et l’horizon s’étant légèrement éclairci vers les sept heures du matin, on put distinguer les signaux que l’équipage agitait sans cesse.

Tous les hommes sur lesquels on pouvait compter à bon droit se trouvèrent bientôt réunis. Julien Morel aussi venait de se rendre à l’appel du vieux prêtre, cette fois transformé en amiral. On tint conseil sur la falaise. M. Tanguy envoya cinq ou six matelots battre les grèves, les rochers et les cavernes de la pointe, dans le but de s’emparer du prisonnier évadé. Il garda auprès de lui Madec, Julien et deux autres, puis commanda de parer la meilleure embarcation du port, afin de porter secours aux malheureux que le naufrage menaçait.

En quelques minutes, tous les préparatifs de ce dangereux appareillage furent terminés. Il était impossible de se dissimuler l’imminence du péril. Julien lui-même, le brave pilote, en voyant la hauteur des lames, et peut-être, disons-le, à la pensée de la chère famille qu’il n’avait revue qu’un jour, Julien sentit sa main trembler sur la barre du gouvernail. Mais cette impression ne dura qu’un instant. M. Tanguy paraissait si rassuré, si intrépide ; il donnait ses ordres avec