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Page:Du Laurens de la Barre - Fantômes bretons.djvu/85

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LA FOLLE DE SUCINIO


Ainsi ont été dissipés les doutes que je conservais encore ; j’ai tout appris, — du moins je l’espère, — et Dieu veuille que Mizan, s’il était en état de sauver son patron, ne lui ait pas refusé son aide, au dernier moment ! Oh ! non, non ! son crime est assez grand, sans y ajouter. Seigneur, faites-lui miséricorde !…

Un mois plus tard, à peine, la pauvre Julie est trépassée entre mes bras. À son dernier soupir, on eût dit que sa piété lui rendait quelque raison, car elle répétait attentivement les prières du prêtre qui l’assistait ; pourtant, elle délirait de temps à autre et murmurait tout bas à mon oreille : — Rends-lui son argent ; Claude, rends-lui son argent !

Notre argent, que m’importe ! Il est passé dans les mains de leurs héritiers. Ah ! qu’ils le gardent, ce fatal argent, puisqu’il ne saurait me rendre mon mari !…


La veuve du capitaine a cessé de parler pour essuyer ses larmes ; puis, voyant revenir l’innocente Janic, les mains pleines de coquillages, et presque joyeuse malgré son air de mélancolie, elle est allée au-devant de la petite fille et s’est éloignée rapidement du côté des ruines du vieux château.


Coat-ar-Roch, le 8 août 1870.