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NOTES.

Plusieurs monuments étrangers des mêmes époques l’emportent encore sur les nôtres par les proportions.

    Manteaux, des Mathurins, des Cordeliers, de la Chartreuse de Vauvert, et de plus les abbayes de Royaumont et de Maubuîsson.

    M. Dulaure donne presque tous ces travaux à Pierre de Montreuil, et y ajoute la Sainte-Chapelle de Vincennes, le réfectoire et la chapelle de la Vierge, détruite de nos jours, de l’abbaye Saint-Germain-des-Prés. Ne serait-il pas juste de partager ce lourd fardeau entre ces deux compétiteurs ? car il parait qu’il y eut un Eudes de Montreuil, mort en 1289, et un Pierre de Montereau ou de Montreuil, dont la fin précéda de 23 ans celle de son rival. L’impulsion de ces grands travaux n’ayant été donnée que par saint Louis, la surcharge appartient de droit à celui qui vécut plus long-temps après le règne de ce roi : aussi, recherches faites, notamment dans Piganiol, nous considérons comme appartenant à Eudes tout ce que lui accorde Millin, excepté la Sainte-Chapelle, que nous reprenons pour la donner à Pierre. Nous dépouillons ensuite Pierre de tout ce que lui octroie M. Dulaure, sauf des travaux faits à l’abbaye Saint-Germain-des-Prés, authentifiés par son épitaphe et par celle de sa femme, où on lit pour lui Musterulo natus, ce qui peut se traduire par : né à Montereau, et pour sa femme, Annès de Montereul, mot dont la désinence latine s’appliquait peut-être également à la ville de Montereau. Nous donnons, par contre, à Pierre, en dédommagement, le joli réfectoire de Saint-Martin-des-Champs, conservé par hasard et qu’on vient presque de découvrir.

    La Sainte-Chapelle, son principal titre de gloire, est, comme on le voit, et cette remarque s’applique à plusieurs édifices de même époque, d’une élévation entièrement égale à sa profondeur. Monument des pieuses convictions qui coûtèrent la vie à notre saint roi, comme des autres sacrifices qu’il leur fit, elle ne fut conçue et élevée que comme reliquaire pour les saintes dépouilles acquises à Constantinople, ou cédées à si grand prix à l’illustre pèlerin par les Vénitiens : aussi fut-elle rendue digne à tous égards de cette haute destination. La valeur des reliques proprement dites n’étant pas toute dans leur importance idéale, on s’efforça, en prodiguant la sculpture, l’or, la peinture et l’émail, de mettre la décoration de l’édifice en harmonie avec l’éclat des beaux et riches phylactères orientaux : « Et croit l’on, dit l’auteur de la vie de saint Louis, que les aournemenz des dites reliques valent bien cent mille livres de tournois et plus. » Félibien évaluait, il y a environ cent soixante ans, la dépense totale de la Sainte-Chapelle à trois millions de cette époque, où le marc d’argent ne valait