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Première ville et capitale de la province.
HANG TCHEOU FOU.


C’est une des plus riches et des plus grandes villes de l’empire : elle est surtout considérable par sa situation la plus avantageuse qu’on puisse désirer, par le nombre prodigieux de ses habitants, par la commodité de ses canaux, et par le commerce qu’elle fait des plus belles soies du monde.

A en croire le proverbe chinois, c’est le paradis de la terre. Elle est de figure presque ronde, et a quarante lis ou quatre lieues de circuit, sans y comprendre les faubourgs. Ces lis doivent être de trois cent soixante pas. Depuis la porte orientale jusqu’à la porte septentrionale, on compte dix lis, un de nos missionnaires en comptant les pas des porteurs de chaise, jugea aisément que le li avait cette mesure.

Pour ce qui est du nombre des habitants, il monte à plus d’un million d’âmes. Un bachelier chrétien assura un missionnaire qui y résidait, que dans le seul enclos de la ville, sans y comprendre les faubourgs qui sont immenses, les officiers qui lèvent la taille, avaient sur leurs rôles environ trois cent mille hou ou familles, san che ouan, c’est ainsi qu’il s’exprimait en chinois : san che ouan signifie trente fois dix mille.

Les murailles de Hang tcheou sont belles, fort hautes, et fort épaisses. L’eau des canaux de la ville n’est pas belle. Il y a sur les canaux des faubourgs une quantité prodigieuse de barques habitées par des familles entières. Les rues sont assez étroites, mais les boutiques sont propres, et les marchands y passent pour être très riches.

Ces rues sont embellies d’arcs de triomphe : on en trouve surtout dans les places de grand abord : ce sont autant de monuments élevés en l’honneur des mandarins, qui se sont distingués dans les fonctions de leurs charges, ou qui ont été élevés aux premières dignités de l’empire. On y voit aussi quatre grandes tours à plusieurs étages. Il y a sept mille hommes de garnison sous le tsiang kiun, ou général tartare ; et trois mille sous le fou yuen ou viceroi.

Quoiqu’il y ait de grands jardins dans la ville, et que les maisons n’aient qu’un étage, il est étonnant combien elle est peuplée : les grandes rues fourmillent de monde comme celles de Paris, avec cette différence qu’on n’y voit aucune femme. Les troupes tartares y ont une forteresse qui est séparée de la ville par une muraille. Le fleuve appelé Tçien tang kiang coule auprès de ses murs, et a en cet endroit une grande lieue de largeur.

On peut dire sans aucune exagération, que Hang tcheou est proprement le pays de la soie, parce que c’est là principalement qu’on la met en œuvre. On prétend qu’elle renferme environ soixante mille ouvriers dans son enceinte. Si cela est, il doit y en avoir plusieurs centaines