Page:Du halde description de la chine volume 1.djvu/407

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et les rendit bien plus fertiles. On verra dans la suite qu’un service si important ne fut pas sans récompense.

Cependant Yao songeait à se donner un successeur, et sans écouter les mouvements de la tendresse paternelle, il n’eut égard qu’aux intérêts de son peuple. Il découvrit un jour son dessein aux seigneurs de sa Cour. L’un d’eux lui représenta qu’il avait dans son fils aîné un prince aussi digne du trône, qu’il était digne d’être son fils, et que les peuples ne manqueraient pas de respecter dans son sang des vertus héréditaires : Je déteste autant ceux qui louent les méchants, répondit Yao, que ceux qui blâment les gens de bien ; je connais mon fils, sous de beaux dehors de vertu, il cache des vices qui ne sont que trop réels. Cette réponse ferma la bouche à tous les seigneurs.

A quelque temps de là, Yao fit venir un de ses ministres, en qui il avait le plus de confiance, par l’estime qu’il faisait de sa prudence et de sa probité, et voulut déposer entre ses mains sa couronne. Ce sage ministre s’excusa de recevoir cet honneur, sur ce que le fardeau était trop pesant, pour des épaules aussi faibles que les siennes, et en même temps il lui proposa un laboureur nommé Chun, que la vertu, la probité, la patience dans les plus dures épreuves, la confiance qu’il s’attirait de tous les gens de bien, et une infinité d’autres excellentes qualités rendaient digne du trône.

Yao le fit venir, et pour éprouver ses talents, il lui confia le gouvernement d’une province. Chun se fit une si grande réputation de sagesse, de prudence, de modération, et d’équité, qu’au bout de trois ans Yao l’associa à l’empire, et lui donna ses deux filles en mariage.

L’empereur vécut encore 28 ans, dans une grande union de sentiments, avec le nouveau collègue qu’il s’était donné. Se voyant prêt de mourir, il appela Chun et l’exhorta à gouverner ses sujets en vrai père, et à se souvenir qu’il était plus pour les peuples, que les peuples n’étaient pour lui, et qu’un empereur n’est élevé au-dessus du reste des hommes, que pour procurer leur avantage, et prévenir leurs besoins. En finissant ces mots il rendit le dernier soupir à l’âge de 118 ans, laissant après lui neuf enfants. Tous les peuples qui trouvaient dans ce prince l’amour et la tendresse d’un père et d’une mère, le pleurèrent pendant trois ans.


CHUN. Neuvième empereur.
A régné seul 50 ans.


C’est la vingtième année de ce cycle que mourut Yao, et Chun commença l’année suivante à gouverner seul l’empire. Il est regardé, de même qu’Yao, comme l’un des législateurs de la nation.