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qu’on fait les cordes des instruments de musique, parce qu’elle est forte et résonnante.


Des mûriers sauvages

Au reste, il ne faut pas croire que ces arbres tche, ou mûriers sauvages, ne demandent aucun soin, et qu’il suffise de les charger de vers à soie. Il faut ménager dans ces petites forêts quantité de sentiers en forme d’allées, afin de pouvoir arracher les mauvaises herbes qui croissent sous les arbres. Ces herbes sont nuisibles, en ce qu’elles cachent des insectes, et surtout des serpents, qui sont friands de ces gros vers. Ces sentiers sont encore nécessaires, afin que les gardes parcourent sans cesse le bois, ayant le jour une perche à la main, ou un fusil, pour écarter les oiseaux ennemis de ces vers ; et battant la nuit un large bassin de cuivre, pour éloigner les oiseaux nocturnes. On doit prendre cette précaution chaque jour, jusqu’au temps où l’on recueille les coques travaillées par les vers.

Il est à observer que les feuilles, auxquelles les vers n’ont point touché au printemps, doivent être arrachées pendant l’été. Si on les laissait sur l’arbre, les feuilles qui renaîtraient le printemps suivant, auraient des qualités vénéneuses et malfaisantes. On trouve dans un livre chinois sur les plantes, la circulation de leur suc clairement exprimée. On juge sans doute que ce suc qui circule, et qui des vieilles feuilles coulerait dans la matrice, nuirait par sa grossièreté à la sève, qui monte de la racine de l’arbre jusqu’à l’extrémité de ses branches.

Pour rendre les arbres tche plus propres à nourrir des vers domestiques, il est bon de les cultiver à peu près de même que ses mûriers véritables. Il est surtout à propos de semer du mil dans le terroir, où on les aura planté un peu au large. Le mil corrige l’âpreté des petites feuilles de l’arbre de tche qui deviennent plus épaisses et plus abondantes ; les vers qui s’en nourrissent, travaillent les premiers à leurs coques, et leur soie en est plus forte.

Peut-être ferait-on quelques découvertes semblables en Europe, si l’on observait sur les arbres les coques de vers qui y sont attachées. Il faudrait les prendre avant que les vers fussent changés en papillons ; car quand ils sortent de leurs coques, ils n’y laissent pas leurs œufs, que divers incidents font périr en grande partie. Il faudrait aussi ramasser plusieurs de ces coques animées, afin d’avoir des papillons mâles et femelles ; et les œufs étant éclos l’année suivante, on les répandrait sur les arbres d’où on les aurait tirés, et ils s’y nourriraient sans peine. Il y a apparence que c’est ainsi qu’on a fait à Chine la découverte des vers à soie.

On a fait une observation, dont l’auteur chinois ne parle point, et qui peut néanmoins avoir son utilité, c’est qu’au lieu de l’arbre tche, dont les feuilles nourrissent les vers, qui travaillent à la soie propre à faire des kien tcheou, on peut employer les feuilles de chêne. Le feu empereur Cang hi en a fait l’expérience. Une année qu’il passa l’été et l’automne à Ge ho, en Tartarie, il fit nourrir des vers à soie sur des chênes ; sans doute que c’était des premières feuilles encore tendres, que ces vers se nourrissaient.

Mais, enfin l’épreuve en a été faite, et peut-être que si on hasardait de