tout ce qui est nécessaire pour l’agriculture ; puis y envoyer ceux qui seront convaincus de certains crimes, ceux qui ayant mérité l’exil, l’ont évité par quelque amnistie. Comme cela ne suffirait pas, on peut accorder à certains coupables de se racheter, en fournissant pour y envoyer tant d’esclaves, hommes et femmes ; et accorder certains honneurs à celui qui en fournira volontairement un certain nombre. Enfin, si tout cela ne suffit pas, il faut proposer des honneurs et des récompenses à ceux qui voudront bien s’offrir d’eux-mêmes, et ordonner aux magistrats de leur fournir de quoi se marier, s’ils ne le sont pas ; sans cela il serait difficile de les y fixer.
Non seulement il faut pourvoir à chaque famille de tout ce qui est nécessaire pour l’agriculture ; mais de plus il convient d’établir des lois qui leur soient avantageuses. Par exemple, il faut régler, que si les ennemis font des courses sur nos terres, et qu’on en prenne, la moitié de ces esclaves sera pour ceux qui les auront pris, et les magistrats seront tenus de les acheter d’eux sur-le-champ à un prix raisonnable et fixé. Ainsi ces peuples, partie par l’espérance du gain, partie pour se soutenir les uns les autres, comme étant parents et alliés, seront alertes et hardis à courir sur les Hou, s’ils s’émancipent. Faits au climat dès leur jeunesse, et instruits de ce qui regarde ces barbares, ils les craindront moins, et seront plus en état de les contenir, ou de les vaincre, que des troupes qu’on y enverrait d’ailleurs. Par ce moyen, vous évitez les inconvénients qui arrivèrent sous Chi hoang, et qui ne manquent point d’arriver, quand on envoie si loin des armées. Vous assurez vos frontières, en procurant des avantages réels, qui croîtront encore avec le temps ; et ces établissements, si vous les faites, sont capables seuls de rendre à jamais célèbre la mémoire de votre règne.
Grand prince. C’est avec bien de la joie, que j’ai appris que Votre Majesté prend le parti d’assurer à l’avenir ses frontières, en y établissant des colonies. Ce seront de gros frais et de gros embarras épargnés pour l’avenir. C’est prévenir des inconvénients fâcheux ; et vous ne pouvez donner à vos peuples une marque plus solide de vos bontés. Il ne s’agit plus d’autre chose, sinon que vos officiers se conforment à vos bonnes intentions ; qu’intelligents et désintéressés ils manient adroitement les esprits, et gagnent si bien le cœur des peuples qui auront été transportés dans les premiers établissements, qu’ils ne puissent regretter leur terre natale. Au moyen de quoi, j’ose assurer que le monde ne manquera point ; et que bientôt de toutes parts les pauvres gens s’exhorteront les uns les autres, et s’assembleront pour y aller.