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tellement épouvantés du ravage qu’elles firent, quand on les eût tiré sur eux, qu’ils prirent la fuite, et n’osèrent plus en approcher.

En l’année 1636 que la persécution était allumée contre les prédicateurs de l’Évangile, et que depuis environ dix ans ils se tenaient cachés sans oser paraître, les Tartares firent une nouvelle irruption dans l’empire. Les mandarins de guerre délibérèrent des moyens de s’opposer aux courses de ces barbares, et parlèrent de fortifier les places, et de les garnir d’artillerie.


Fonte de canons à la Chine.

On se souvint qu’on avait souvent ouï dire au docteur Paul Siu, ce colao si zélé pour le christianisme, que les missionnaires savaient l’art de fondre du canon : ils supplièrent aussitôt l’empereur, d’ordonner au père Adam Schal, président du tribunal des Mathématiques, d’en faire fondre. Sa Majesté voulut savoir auparavant si ce Père en avait la pratique : mais les mandarins s’étant chargés de le savoir adroitement de lui-même, sans qu’il s’aperçût de leur dessein, supplièrent l’empereur d’en faire expédier l’ordre dont ils ne se serviraient qu’à propos.

Ils obtinrent ce qu’ils souhaitaient, et étant allés visiter le Père, sous prétexte de lui proposer quelques difficultés d’astronomie, ils l’interrogèrent sur diverses parties des mathématiques, et lui demandèrent comme par occasion, s’il savait les règles qu’il fallait observer pour fondre du canon. Le Père ayant répondu qu’il en savait les principes, ils lui présentèrent à l’instant l’ordre de l’empereur.

Le missionnaire eût beau s’en défendre, en répétant sans cesse que la pratique était bien différente de la théorie, il lui fallut obéir, et instruire des ouvriers. On lui assigna un lieu propre attenant du palais, afin qu’il pût être aidé des eunuques de la cour.

Dans la suite les divers ouvrages d’optique, de statique, d’architecture tant militaire que civile, et divers instruments de bois et de cuivre, que le père Ferdinand Verbiest avait fait faire pour l’observatoire de Peking, persuadèrent aux mandarins, qu’il ne serait pas moins habile à fondre des canons, pour défendre l’empire des insultes de ses ennemis, et en particulier de certains voleurs, qui infestaient les côtes de la Chine et les provinces frontières dont on avait beaucoup de peine à les chasser.

C’est pourquoi ils présentèrent à l’empereur un mémoire par lequel ils le suppliaient d’ordonner au père Verbiest, pour la conservation de l’État, d’instruire des ouvriers de la manière de fondre et de fabriquer des canons. Le missionnaire qui avait lu dans les archives de l’église de Peking, que sous la dernière famille des empereurs chinois, on s’était servi de ce moyen, pour introduire dans l’empire un grand nombre d’ouvriers évangéliques, crut que ce service, qu’il rendrait à un si grand prince, ne manquerait pas de le rendre favorable à la religion chrétienne. Il fit fondre 130 canons avec un succès admirable.

Quelque temps après, le Conseil des premiers mandarins de guerre, présenta un mémoire à l’empereur, pour lui faire connaître la nécessité où ils étaient, d’avoir, pour la défense de leurs places, 20 pièces de canon de calibres différents, à la façon de ceux d’Europe. L’empereur répondit à