Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/837

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et de chansons, qui sont du temps qu’on appelle les six dynasties, quoiqu’on y trouve dans le dernier détail tout ce qui était censé donner de la grâce au sexe.




DES FILLES DES EMPEREURS.


Tai tsong, second empereur de la dynastie Tang, donna une de ses filles en mariage au fils de Ouang kouei, alors président de la cour des rits. Ouang kouei recevant chez lui cette princesse, lui dit : les rits prescrivent à une bru la manière de se présenter devant un beau-père et sa belle mère. A la vérité dans ces derniers temps, où les plus louables coutumes s’abolissent insensiblement, on n’a pas fait observer cet usage aux princesses en les mariant ; mais nous avons aujourd’hui un empereur très éclairé, qui sait de quelle importance il est que les rits soient en vigueur, et qui souhaite qu’on les observe. Ainsi, princesse, trouvez bon que nous vous recevions comme une bru doit être reçue : ce n’est point par esprit de vanité, ni pour notre honneur particulier que nous agissons de la sorte, c’est par zèle pour les rits, et parce que de leur observation dépend le bien des familles et des États. Aussitôt lui et sa femme prirent le haut de la salle, et s’étant tous deux assis, la princesse, nouvelle bru, la serviette sur le bras, leur donna d’abord à laver, puis leur servit à manger : après quoi ils se retirèrent. La chose ayant été rapportée à Tai tsong, il l’approuva fort, et régla que dans la suite, les princesses qu’on marierait, en feraient autant.


Hiao vou, un des empereurs de la dynastie Song, sachant que les princesses qu’on mariait, se rendaient insupportables dans les familles où elles entraient, chercha les moyens d’y remédier. Il en prit un entr’autres assez singulier. Ayant destiné une de ses filles à Kiang min, fils de Kiong chin, que sa vertu et ses services avaient élevé aux plus grands honneurs, il ordonna secrètement qu’on dressât au nom de Kiong chin une forte représentation, où l’on mît dans tout son jour la conduite de ces princesses, et dont la conclusion fût qu’il s’excuserait de recevoir pour épouse celle qu’on lui présentait. L’écrit en effet fut dressé et présenté à l’empereur. Le voici tel qu’il est rapporté dans Tang king tchuen.

Prince, Votre Majesté a eu la bonté de me destiner la princesse Ling hai[1]. C’est une grâce peu commune, et que je n’avais aucun lieu d’attendre. Cependant je ne puis dissimuler que j’ai reçu cet ordre avec autant de trouble et de tristesse, que de reconnaissance et de respect. Mon indignité personnelle, encore plus que ma naissance, m’éloigne d’une si haute alliance. Ce qui me convient, c’est une personne du commun,

  1. Le chinois dit : a ordonné que la princesse Ling hai s'abaissât jusqu'à devenir ma femme.