extérieurs : car un jeune enfant ne manque guère de prendre l’air et les manières de sa nourrice.
Si celle qu’on a choisie, était obligée de quitter son propre enfant, pour allaiter le votre ; elle n’y ferait contrainte que par la pauvreté : ainsi il faut non seulement lui donner des gages raisonnables ; mais il faut encore pourvoir à l’entretien de son fils ; c’est le moyen que le cœur de l’un et de l’autre soit content.
De plus il est nécessaire de veiller sur la conduite de ces nourrices ; de ne point souffrir qu’elles portent votre enfant chez les voisins, dans les rues, et les places fréquentées, ni qu’elles attirent chez vous des esclaves, ou de vieilles femmes du voisinage : on en voit assez les suites.
Quand il vous naît un fils, et que vous êtes déjà avancé en âge, vous ne vous possédez pas de joie : vous choyez cet enfant avec tout le soin imaginable ; vous annoncez sa naissance devant le tableau des ancêtres : vous jeûnez, vous faites différentes œuvres de charité ; et vous espérez par ces jeûnes et par ces bonnes œuvres, obtenir une longue vie à ce cher enfant.
C’est un usage universellement reçu, de donner de grandes démonstrations de joie à la naissance d’un fils : on cuit, on durcit quantité d’œufs de poule, et de cane ; on prépare du riz clair pour ceux qui viennent prendre part à notre joie, et faire des compliments de conjouissance. On envoie ensuite chez eux divers présents de choses propres à se régaler, ; c’est ce qui s’appelle le régal du poil follet.
La cérémonie est plus grande le troisième jour qu’on lave l’enfant : on prépare des œufs par centaines et par mille ; on les peint de toutes sortes de couleurs, et on les nomme les œufs du troisième jour : c’est alors que les parents et les voisins viennent en foule à la porte de la maison, pour offrir pareillement des œufs, et diverses sortes de gâteaux sucrés.
Parmi les riches, la dépense est bien plus grande, surtout s’il y a longtemps qu’ils attendent un héritier : on tue une grande quantité de poules, de canards, etc. On fait un grand festin, et l’on n’épargne rien pour donner des marques publiques de réjouissance. Mais ne craint-on point que la prière qu’on fait pour obtenir une longue vie à l’enfant nouveau-né, ne soit rejetée par les dieux, à qui on l’adresse[1] ? En demandant une longue suite d’heureux jours pour son fils, il conviendrait de la laisser à tant d’animaux qu’on égorge : pour avoir ce fils, on s’est abstenu de rien manger qui eût vie : si l’on agissait conséquemment, il faudrait continuer la même abstinence pour obtenir sa conservation.
Mais, quoi, dira-t-on, lorsque des parents et des amis viennent nous féliciter de la naissance d’un fils, n’est-il pas permis de faire éclater sa joie ? A la bonne heure ; faites-leur un petit régal de fruits, de gâteaux, de vin, et de quelques autres mets semblables ; mais ne faites rien de plus.
- ↑ Le Philosophe parle ici selon les folles idées du peuple, dont il se moque ailleurs. Ces divinités sont Cheou, le génie du grand âge ; Lou, le génie des dignités, Ru, le génie des richesses.