Page:Du halde description de la chine volume 4.djvu/61

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Ils étaient tous vassaux de Dalai han ou plutôt du Grand lama : mais l'empereur ayant détruit les Eluths du Caldan, fit inviter ces huit taikis de le venir trouver. Celui qui tenait parmi eux le premier rang, se rendit auprès de l'empereur, il en fut reçu favorablement, aussi se fit-il son vassal, et il reçut de Sa Majesté le titre et les sceaux de Tsin vang, c'est-à-dire, de régulo du premier ordre : quelques-autres des huit princes se contentèrent d'envoyer des députés à l'empereur, pour lui rendre leurs hommages. L'empereur ne veut pas assujettir par la force des armes ce qui reste des princes de ces deux maisons des Eluths, il aime mieux les attirer par la douceur en les traitant bien, en leur envoyant souvent des présents qu'on appelle ici des récompenses, ce qui les engage à envoyer pareillement leurs présents, auxquels on donne le nom de tributs. Il y a liberté entière à tous ces Eluths de venir commercer à la Chine, et, jusqu'à Peking même ; on n'exige d'eux aucun droit, on leur fournit même tout ce qui est nécessaire pour leur subsistance pendant 80 jours, qui est le temps qu'on leur accorde pour leur commerce ; ce temps expiré, s'ils veulent rester plus longtemps, à eux permis, mais on ne leur fournit plus rien. On en use de même avec les Tartares mahométans qui trafiquent à la Chine ; on permet le commerce à tous ceux qui voyagent par terre, et qui viennent à la Chine par les provinces de l'occident ; la vue qu'on a, c'est d'engager peu à peu ces peuples à se soumettre à l'empereur, par l'espérance d'un riche négoce, et par les avantages qu'ils peuvent tirer de sa protection. La faveur de l'empereur les assure contre les entreprises des princes voisins, qui n'oseraient inquiéter ceux que S. M. protège, de crainte d'attirer contre eux les armes victorieuses, qui depuis la défaite du Caldan, sont plus redoutées que jamais dans toute la Tartarie. Il faut dire un mot du Thibet qui appartient au Grand lama : quoique le Dalai han demeure près de Poutala au cœur des États de Thibet, il ne se mêle en aucune sorte du gouvernement de ce royaume : il se contente de régner sur les Eluths qui errent çà et là selon leur coutume, dans les terres où il y a de meilleurs pâturages. Pour ce qui est du Grand lama, comme les affaires temporelles ne sont point de son ressort, il établit un vice-régent qui gouverne en son nom et sous son autorité. Ce vice-régent, qu'on appelle tipa, porte l'habit des lamas quoiqu'il soit marié. L'empereur de la Chine durant la guerre qu'il faisait au Caldan, conféra au tipa la dignité de vang ou de régulo, pour l'attacher à ses intérêts. Il savait que le tipa et les lamas appuyaient secrètement le Caldan et étaient en état de traverser son entreprise. D'ailleurs s'ils se fussent joints aux Mongous, et qu'en même temps ils eussent fait un point de religion de faire la guerre à l'empereur, on aurait eu de la peine à soutenir le choc de tant d'ennemis. A la vérité le tipa n'osa se déclarer ouvertement contre l'empereur de la Chine : mais il ne laissait pas de favoriser assez publiquement le Caldan. Aussi depuis la ruine de celui-ci, l'empereur n'a guère ménagé le tipa, ni même le Grand lama, il leur a fait parler en maître, en leur signifiant les satisfactions qu'il exigeait