Page:Dubois - Le Pantcha-Tantra ou les cinq ruses.djvu/294

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mon riz cuit, et le tenant suspendu au-dessus du ragoût de mouton, je le tournai et retournai dans tous les sens, afin que le riz s’imbibât le plus possible de l’excellente vapeur du ragoût ; ce que je continuai de faire jusqu’à ce que le mouton, étant assez cuit, fût retiré du feu. Alors je m’assis dans un coin de la chauderie, où je mangeai tranquillement mon riz, qui me parut excellent, quoiqu’il n’eût été assaisonné que de ces vapeurs.

Le lendemain matin, comme je me disposais à continuer ma route, le gardien de la chauderie m’arrêta et me dit d’un ton résolu qu’avant mon départ je devais lui payer la fumée de son ragoût de mouton, avec laquelle j’avais assaisonné mon riz de la veille.

Que dites-vous là ? lui répondis-je avec étonnement et tout en colère. A-t-on jamais vu quelqu’un demander de l’argent pour de la fumée ? Je refusai de payer et je criai tout haut à l’injustice : mon adversaire, de son côté, me prit au collet et me dit qu’il ne me lâcherait pas que je ne lui eusse payé les vapeurs de son ragoût. Enfin, ne pouvant nous accorder, nous en appelâmes l’un et l’autre au chef du village pour terminer le différend.

Heureusement le chef de ce village était un