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Page:Dubois - Tombouctou la mystérieuse, 1897.djvu/113

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DIENNÉ

(et que je ne revis jamais plus) : un nègre étonné et ému, non de quelque invention européenne, mais d’un spectacle de son propre pays ! Je me précipitai à l’avant. Et, à mon tour, je demeurai étonné : c’était la première fois aussi qu’en ces pays une surprise me venait d’une œuvre des hommes.

Les sites curieux ou jolis ne m’avaient pas fait défaut le long de ma route. Toutefois, quelque chose manquait à l’œil comme à l’esprit du civilisé. Rien n’évoquait le génie humain. Pas de trace d’une civilisation. Quoi qu’on ait dit des mutilations et des sacrilèges que souvent la main de l’homme a fait subir aux chefs-d’œuvre de la nature, il faut bien avouer qu’on trouve ceux-ci incomplets lorsque, trop longtemps ; on est condamné à ne voir qu’eux uniquement. La vallée de la Loire en sa seule robe estivale serait assurément un beau spectacle. Mais, sertissant ces pierres précieuses qui s’appellent Amboise, Tours, Chambord, Chenonceaux, de beau, le spectacle n’est-il pas devenu merveilleux ?

Le joyau de la vallée du Niger, c’est Dienné.

Perché à mon tour sur l’avant, entre les Bosos émus, voici le tableau qui se grava dans ma mémoire :

La plaine vaste, sans le moindre accident, infiniment plate, sans village, sans autre trace humaine ; de loin en loin, seulement un arbre, plaquant d’une tache sombre l’immensité vert-jaune.

Au milieu de cette solitude se détache un anneau d’eau, et là, surélevée, dominatrice comme le panache du palmier parmi les sables, une longue masse de hautes et régulières murailles se dresse sur des berges hautes déjà et presque aussi droites que les murailles mêmes. Enfin, couronnant celles-ci, une forêt de saillants : toits en terrasse, palmiers, pignons, ar-