vaient m’être utiles. Une vie charmante commença dans cette même maison où je n’étais entré qu’avec des défiances.
Dans la pénombre de la petite cour à demi couverte par une véranda et défendue, en outre, contre l’ardeur du soleil saharien par de grandes tentures, ce furent chaque jour, le matin comme l’après-midi, des réunions nombreuses. Eux siégeaient accroupis sur leurs talons le long des murs, moi sur l’unique chaise devant ma petite table et du papier blanc. Ce tableau me rappelait certains coins de la mosquée-université El Azhar, entrevue au Caire. C’était un cours, en effet, seulement les proportions étaient renversées : les professeurs étaient le nombre, et l’élève était l’unité. La lente, mais pittoresque et minutieuse parole orientale coula à pleins bords. Plus tard, aux récits succéda la lecture des vieilles chroniques tombouctiennes.
Nos réunions n’avaient pourtant rien de pédant ni d’apprêté : chacun parlait au hasard de ses souvenirs, et d’un sujet l’on sautait à l’autre le plus aisément du monde. Rien de solennel non plus : du thé, du café, des cigarettes circulaient de temps à autre. Les pigeons des voisins et « mes poules » faisaient parfois irruption, mais avec discrétion. Étaient régulièrement de la partie des pinsons à gorge et à queue rouges et d’amusants lézards, qui habitaient de compte à demi avec moi les chambres. Les uns et les autres s’ébattaient autour de nous avec une effronterie sans pareille, ceux-ci grimpant sur les visiteurs, ceux-là voletant, sautillant, piaillant sans répit. Nul n’y prenait garde que moi, tant ces hôtes sont familiers à Tombouctou et coutumiers de ces caprices.
De plusieurs jours je ne quittai ma demeure. Ma vie était si pleine que je n’en avais nul loisir. Elle était si agréable, si variée, si mouvementée aussi dans ce milieu étroit, que je n’en avais nul désir. Bientôt, sans que j’eusse mis le pied dans la rue, une Tombouctou nouvelle me fut révélée. Le