Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/207

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après avoir soumis l’intérieur de la Germanie, y laisserent pour la tenir en sujecion, des camps palissadés & retranchés, & que les Bourguignons qui sont aujourd’hui une Nation si nombreuse, sont les descendans des Soldats qu’on y avoit mis pour les garder. On prétend même que le nom de Bourguignon leur vient de ce qu’on appelle en langue du Païs, des Bourgs, les lieux fortifiés à dessein de couvrir une Contrée. Les Provinces des Gaules qu’ils ont occupées, & qu’ils tiennent aujourd’hui, sont une preuve que cette Nation est à la fois nombreuse & entreprenante : il est vrai que la Providence a voulu que ces Bourguignons embrassassent la véritable Religion. Ainsi la Foi Catholique, dont ils font profession, & nos Ecclésiastiques dont ils ont reconnu le pouvoir spirituel, les ont rendus doux & traitables. En effet, ils ne vivent point dans les Gaules avec les anciens habitans des Pais où ils sont cantonnés, comme avec des étrangers subjugués, mais comme avec leurs freres en Jesus Christ. » Nous verrons dans la suite de cet ouvrage, que trente ans après le tems où Orose écrivoit, les Bourguignons devenus ariens, traiterent les Romains des provinces des Gaules, dont ils s’étoient rendus les maîtres, avec une injustice bien éloignée de la débonnaireté dont cet historien les avoit loüés. Je me contenterai d’ajoûter pour confirmer ce qui se lit dans Orose concernant l’origine de la nation des Bourguignons ; qu’eux-mêmes ils se prétendoient issus des Romains. Ils répondirent à l’empereur Valentinien qui leur demandoit du secours contre d’autres peuples de la Germanie, qu’ils lui en donneroient d’autant plus volontiers, qu’ils n’avoient point oublié que leur nation étoit descenduë de la nation romaine.

Il convient de suspendre ce que j’ai encore à dire concernant les Bourguignons, pour faire une observation, dont je prie le lecteur de se souvenir, parce qu’on ne sçauroit l’avoir trop presente à l’esprit quand on lit une histoire qui traite des roïaumes fondés par les barbares sur le territoire de l’empire romain. Cette observation sert à empêcher qu’on ne trouve de l’opposition dans des récits, qui d’abord semblent se contredire. La voi-