Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/253

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ter une irruption dans les Gaules. Le même motif, qui dans le quatriéme et dans le cinquiéme siecle de la fondation de Rome, avoit engagé les Gaulois, dont la patrie n’étoit point encore aussi-bien cultivée qu’elle l’étoit quatre cens ans après, à faire des invasions en Italie, rendoit les barbares de la Germanie, et ceux des pays voisins du Danube, toujours disposés à venir saccager les provinces de la Gaule. Ce motif étoit le dessein d’envahir, ou du moins de piller un pays rempli de biens, et sur tout abondant en vin, ainsi qu’en plusieurs sortes de fruits qu’on ne connoissoit pas encore dans la patrie de nos barbares. Ainsi comme Brennus et les Gaulois qui le suivoient étoient allés en Italie, poussés principalement du desir de boire abondamment du vin, et de manger des fruits qu’on ne recueilloit point encore dans leur pays ; de même les Germains qui faisoient des courses dans les Gaules durant le troisiéme siécle et les siécles suivans, y venoient principalement pour y satisfaire une pareille envie.

Dès que les Gaules eurent été assujetties à Rome, leurs habitans avoient appris la culture des vignes, et ils en avoient planté dans leur pays. Il est vrai que l’empereur Domitien avoit ordonné par un édit celebre qu’il ne seroit plus fait de nouveaux plans de vigne même en Italie, et que l’on seroit obligé d’arracher dans plusieurs provinces de l’empire, la moitié de celles qui étoient déja plantées. Mais cet édit n’avoit jamais été exécuté à la rigueur. D’ailleurs Probus qui regna environ deux siécles après Domitien, avoit permis expressément aux habitans des Gaules et de plusieurs autres provinces de l’empire de planter autant de vignes qu’ils le trouveroient à propos. Cet empereur avoit même employé les troupes à ce travail, et lorsque quatre-vingt ans après Probus, Julien commandoit les armées dans les Gaules, les environs de Paris étoient couverts de vignobles. Dans tous les tems les barbares ont eu pour le vin, lorsqu’ils l’ont connu, le même goût que les sauvages d’Amérique, et les négres, ont pris pour l’eau-de-vie, aussitôt que cette liqueur dan-