Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/278

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mettre sous son obéissance par force, elles n’ont jamais cependant reconnu d’autres souverains que l’empire, ni refusé de l’aider lorsqu’il leur demandoit du secours, et cela jusqu’à l’année quatre cens quatre-vingt-dix-sept qu’elles se soumirent à Clovis, en conséquence du traité qu’elles firent avec lui, aussi-tôt après son baptême.

Les apparences sont même que les Armoriques, c’est-à-dire, ici les peuples du commandement maritime, continuerent après qu’ils eurent érigé leur espece de république, à frapper leur monnoye au coin de l’empereur regnant. Voici quels sont les fondemens de cette conjecture. Les Armoriques doivent avoir frappé un grand nombre d’especes d’or et d’argent durant les quatre-vingt-sept années qui s’écoulerent depuis leur association jusqu’à leur incorporation à la monarchie des Francs. Quoique l’interregne qui eut lieu dans les Gaules durant la guerre civile allumée par la proclamation de Galba, ait été très-court, quoiqu’il ne puisse pas avoir duré une année entiere, nous ne laissons pas d’avoir encore des médailles romaines frappées durant ce court interregne, lesquelles ne portent ni le nom ni l’effigie d’aucun empereur, et qu’on connoît pourtant à leur fabrique être du tems de Neron et de Galba. Cependant parmi les médailles romaines qu’on reconnoît au goût de leur gravure pour être des monnoyes du cinquiéme siécle, il n’y en a point qui ne soit frappée au coin de quelqu’un des empereurs. Voici encore une autre raison qui me porte à croire ce que j’avance : des révolutions pareilles à celle qui se fit dans le gouvernement Armorique, quand les provinces dont il étoit composé, se souleverent contre le souverain, sont toujours suivies de besoins urgens, et qui contraignent d’avoir recours aux expédiens les plus équivoques. Celui de gagner sur la monnoye est ordinairement un des premiers qu’imaginent les Etats dont les finances tarissent.

Un souverain profite sur sa monnoye en deux manieres, qui au fond reviennent au même. Ou bien il augmente le prix des especes d’or et d’argent qui sortent de ses monnoyes, quoiqu’il ne reçoive que pour l’ancien prix, les matiéres d’or ou d’argent qu’on y apporte ; ou bien en laissant les matieres à leur ancien prix, il fabrique des especes moindres soit par le poids, soit par le titre, que les especes qui avoient cours lorsque le prix du marc d’or et le prix du marc d’argent ont été fixés, et néanmoins il donne cours à ces nouvelles especes pour le même prix dont étoient les anciennes. En effet, les provinces-unies du Païs-Bas,