Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/495

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dent vit trois fois dans le cours du cinquiéme siécle les barbares maîtres de la ville de Rome sa capitale, et qu’il vit encore les nations se rendre les seigneurs de ses meilleures provinces. L’empire d’Occident perdit, dans le tems dont je parle, la Grande Bretagne, une partie de l’Afrique, une partie de l’Espagne, et une partie des Gaules, où étoient ses plus grandes ressources. Ainsi Rome étant réduite souvent à demander du secours à Constantinople, qui lui en donnoit quelquefois, soit en lui envoyant des troupes, soit en faisant des diversions en sa faveur ; il ne fut pas bien difficile à Constantinople de s’établir sur Rome un droit de suzeraineté, quelque legers qu’en fussent les fondemens. Il est aisé de faire reconnoître ses droits par des supplians. Enfin les Romains qui ont vêcu dans les tems postérieurs, s’étoient tellement accoutumés à parler de la superiorité que l’empire d’Orient s’étoit arrogée durant le cinquiéme siecle sur l’empire d’Occident, comme d’un droit légitime, et ils avoient si bien eux-mêmes donné ce ton-là aux barbares établis sur le territoire du partage d’Occident, qu’Hincmar dans la lettre où il cite l’édit fait par Honorius en quatre cens dix-huit, pour convoquer dans Arles les sept provinces des Gaules, met le nom de Theodose Le Jeune avant le nom d’Honorius, quoique Theodose ne fût que le neveu d’Honorius, quoique Theodose ne fût monté sur le trône que plusieurs années après Honorius, et quoiqu’enfin il s’agît d’un decret donné pour être exécuté seulement dans l’empire d’Occident. J’ajouterai même, ce qui rend le stile d’Hincmar encore plus digne d’attention, que dans l’acte original qui fut publié en un tems où la superiorité de l’empire d’Orient sur celui d’Occident n’étoit pas encore établie, Honorius est nommé avant Theodose. Nous avons parlé fort au long de cet édit dans notre second livre.

Le célebre Grotius, il est vrai, est d’un sentiment contraire à celui que nous venons d’exposer. Ce respectable sçavant, après avoir dit que la constitution d’Antonin Caracalla, laquelle donnoit le droit de bourgeoisie romaine à tous les citoyens des villes et communautés renfermées dans les limites de l’empire, n’eut d’autre effet que de communiquer à ces nouveaux citoyens, les droits que le peuple romain s’étoit acquis par ses conquêtes, mais que la proprieté de ces droits, que l’autorité de disposer du