Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/632

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ce, rétablisse une bonne correspondance entre l’Italie & les Gaules, ces deux puissantes contrées, qui confinent l’une avec l’autre. S’il est le premier à proposer la paix, ce n’est point qu’il craigne la guerre. Vous sçavez en general quelles sont les bornes légitimes de chacun de ces deux païs, & jusqu’où s’est étendu le district des Officiers employés d’un côté à gouverner les Gaules, & le district des Officiers employés de l’autre à gouverner l’Italie. Que l’Empereur que le Roi des Visigots se contiennent chacun dans les limites du partage qui lui est échu, & qu’un Romain qui a mérité d’être élevé sur le trône puisse se dire votre ami. »

L’ambassadeur de Nepos jugea par le maintien d’Euric, et par le ton dont ce prince profera quelques mots en sa langue naturelle, qu’il avoit été attendri. D’un autre côté, Leon, c’étoit un Romain dont le roi des Visigots se servoit dans ses affaires les plus importantes, et dont nous aurons à parler au sujet des lettres que Sidonius Apollinaris lui a écrites, tenoit la contenance d’un homme qui pense qu’il faille accepter les propositions qu’il vient d’entendre. Mais l’incertitude où pouvoit être encore saint Epiphane ne dura pas long-tems. Euric répondit par le moyen d’un interpréte. Que les traits de l’éloquence romaine l’avoient percé nonobstant le bouclier qu’il portoit à la main, et la cuirasse qu’il avoit endossée. Il ajoûta ensuite : j’accepte les conditions que vous me proposez, et je jure de m’y tenir. Vous, de votre côté, promettez que l’empereur votre maître accomplira le traité tel que vous me l’avez offert, et que je viens de l’accepter. Je me fie à votre simple parole ; il seroit superflu que vous la confirmassiez par un serment. Le traité fut donc rédigé et signé sur le champ, et le vénerable évêque ne songea plus qu’à s’en retourner en Italie. Il est fâcheux que nous n’ayons point ce traité, à l’aide duquel nous éclaircirions bien des choses. Mais nous n’en sçavons gueres plus que ce que nous en apprend Ennodius, dont le but principal est encore de faire honneur à son héros d’avoir été l’entremetteur d’une convention, qui paroît si lâche aujourd’hui.