Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome I, 1742.djvu/677

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deux fils et deux filles qu’il avoit d’elle, tomberent encore au pouvoir de Gondebaud. Il fit couper la tête à Chilpéric. La femme de ce prince infortuné fut jettée dans l’eau une pierre au col. Les deux garçons qu’ils avoient eurent la tête coupée, et ils furent jettés dans le même puits où leur mere avoit été précipitée. Les sœurs de ces princes, dont l’aînée s’appelloit Chroma, et la puînée Clotilde demeurerent en vie. On se contenta de les releguer ; l’aînée prit l’habit que portoient alors les filles qui renonçoient au mariage pour se consacrer au service des autels. Clotilde épousa Clovis treize ou quatorze ans après cet évenement tragique, et dans la suite elle sçut bien tirer vengeance du traitement barbare fait à ses freres, à son pere, et à sa mere.

Comme dans cette catastrophe tout le tort n’étoit pas du côté de Gondebaud, on ne doit pas être surpris qu’Alcimus Ecdicius Avitus fait évêque de Vienne à la fin du cinquiéme siecle, et obligé en cette qualité de complaire à ce prince, maître de la ville capitale de ce diocèse, ait voulu en quelque façon, si ce n’est le justifier, du moins le rendre excusable. Voici donc ce que cet évêque écrit à Gondebaud lui-même long-tems après l’évenement dont nous venons de parler, et quand ce prince s’étoit encore défait de Godégisile le seul qui lui restât des trois freres qu’il avoit eus : » Votre tendresse pour vos proches qu’on ne sçauroit loüer assez, vous a fait pleurer amerement la mort de vos freres. Tous vos Sujets s’affligeoient alors avec vous sur des évenemens dont la Providence vouloit faire un jour le sujet de notre consolation. C’étoit pour le bonheur de l’État que se diminuoit le nombre des Princes de la Famille Royale, & qu’il n’en restoit qu’autant qu’il étoit nécessaire qu’il en demeurâr pour nous gouverner. En effet l’expérience nous a fait voir que des évenemens que nous regardions alors comme des malheurs, étoient destinés à faire un jour notre bonheur. Nous nous congratulons aujourd’hui de ce qui faisoit autrefois le sujet de notre affliction. »