Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/19

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Un fait rapporté par l’abbreviateur, donne lieu de penser que Syagrius possedât outre la cité de Soissons, celle de Troyes ou du moins une partie de cette derniere. Nous verrons que Clovis durant le tems qui s’écoula entre la conquête des Etats de Syagrius faite en quatre cens quatre-vingt-six, et son mariage avec sainte Clotide fait en l’année quatre cens quatre-vingt-douze, ne fit point d’autre acquisition dans les Gaules, que celle de la cité de Tongres. Cependant l’abbreviateur dit que Clovis vint attendre à Villers ou Villery, lieu du diocèse de Troyes, cette princesse qui venoit de la cour du roi Gondebaud, et qui s’avançoit pour sortir du pays tenu par les Bourguignons, et entrer sur celui qui étoit tenu par les Francs[1]. Il semble donc que Clovis fût devenu le maître de la cité de Troyes, dès le tems qu’il s’étoit emparé des Etats tenus par Syagrius ; et par conséquent que cette cité fît partie du pays sur lequel Syagrius regnoit. Il est vrai que Gregoire De Tours ne dit point jusqu’où Clovis s’avança pour recevoir Clotilde, mais l’abbreviateur peut avoir appris cette circonstance de leur mariage, ou de la tradition, ou de quelqu’ouvrage que nous n’avons plus.

Il est toujours certain que l’autorité de Syagrius ne s’étendoit point sur toute la partie des Gaules qui étoit encore réellement soumise au pouvoir de l’empereur de Rome. Quelques écrivains modernes l’ont cru, mais le récit des évenemens de cette guerre montrera bien que l’opinion dont je parle est une erreur. On verra en premier lieu par ce récit, que des cités renfermées dans les provinces obéïssantes ne prirent aucune part à la guerre de Syagrius contre Clovis : elles ne tirerent point l’épée pour deffendre ce Romain. En second lieu on verra que les cités situées entre la Somme et la Seine, ne reconnurent le pouvoir de Clovis qu’en quatre cens quatre-vingt-douze, et que ce fut seulement en quatre cens quatre-vingt-dix-sept que les troupes Romaines prêterent serment de fidelité au roi des Francs, et qu’elles lui remirent la partie des provinces obéïssantes qui étoit sur la Loire. Cependant il est constant par l’histoire qu’immédiatement après la défaite et la mort de Syagrius, qui sont des évenemens appartenans à

  1. Valensii, notit. Gall. pag. 609.