Page:Dubos - Histoire critique de l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome II, 1742.djvu/547

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» Or[1] quand on voulut exécuter cette Ordonnance de Moulins, & ôter en effet aux Villes la Justice civile, plusieurs Villes y formerent opposition, les unes disant que cette Justice leur appartenoit de toute ancienneté, même avant l’établissement de la Monarchie Françoise…… Les Habitans de Boulogne soutinrent hautement contre Monsieur le Procureur Général, qu’ils avoient leur Justice de toute ancienneté, qu’ils s’étoient donnés & joints à cette Monarchie à condition qu’elle leur demeureroit, & en avoient toujours joui depuis. Leur fait fut reçu, & neanmoins faute d’en faire apparoir promptement par titres, il fut dit par Arrêt du mois de Janvier mil cinq cens soixante & onze, que par provision l’Ordonnance seroit exécutée. Autant en fut ordonné dans la cause de ceux d’Angoulême en mil cinq cens soixante & douze. »

René Chopin dit : » Les Habitans de Boulogne sur mer soutinrent aussi un procès contre Monsieur le Procureur Général, & ils y mirent en fait, que leur Justice étoit plus ancienne que la Monarchie Françoise. La Cour ordonna qu’elle en délibereroit. » On aura peine à croire, attendu la qualité des parties, que le parlement de Paris eut sursi au jugement définitif du procès de Boulogne, comme à celui de quelques autres villes, si les habitans de ces villes-là n’eussent point appuyé leurs moyens par des preuves, du moins très-vraisemblables. Suivant la Notice des Gaules, rédigée du tems de l’empereur Honorius, Boulogne étoit la capitale d’une des douze cités de la seconde Belgique ; Angoulême, étoit celle d’une des six cités de la seconde Aquitaine.

Le Capitole de Toulouse qui est encore aujourd’hui en possession de rendre la justice en matiere criminelle, et qui n’a été dépouillé du droit de la rendre en matiere civile qu’en vertu de l’édit de Moulins, soutient qu’il jouissoit, et de la prérogative qu’il a conservée, et de celle qu’il a perdue, avant que la ville de Toulouse fût soumise à la domination de Clovis, et qu’il en a joui sous les trois races de nos rois[2]. Lyon prétend que son corps de ville ne soit originairement autre chose que le senat qui régissoit la cité de Lyon du tems des empereurs Romains, et qui auroit continué l’exercice des fonctions sous les rois

  1. Des Seig. ch. 16. art. 82.
  2. La Faille, Ann. de Toulouse, tom. 3. pag. 55.