Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/391

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afin de paroître uniquement occupé de ce travail, est néanmoins distrait, et qu’il donne son attention, non pas à ce qu’il semble faire, mais à ce qu’il entend. Cette distraction est sensible dans tout son corps, et principalement dans ses mains et dans sa tête. Ses doigts sont bien placez comme ils le doivent être pour peser sur le fer, et pour le presser contre la pierre à aiguiser, mais leur action est suspenduë. Par un geste naturel à ceux qui écoutent en craignant qu’on ne s’apperçoive qu’ils prêtent l’oreille à ce qu’on dit, notre esclave tâche de lever assez la prunelle de ses yeux pour appercevoir son objet sans lever la tête comme il la leveroit naturellement s’il n’étoit pas contraint. Le talent du dessein donne de grandes facilitez pour réussir dans les expressions. Or il suffit de voir l’antinous, la venus de Medicis et plusieurs autres monumens de l’antiquité, pour être convaincu que les anciens sçavoient du moins aussi-bien que nous dessiner élegamment et correctement. Leurs peintres avoient même plus d’occasions que les notres n’en peuvent avoir, d’étudier le nud, et les exercices qui étoient alors en usage pour dénoüer et pour fortifier