Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/66

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est peu propre à décider du prix des perles et des diamans. Une perle baroque et de vilaine eau, de quelque poids qu’elle soit, ne sçauroit valoir la fameuse peregrine

cette perle, dont un

marchand avoit osé donner cent mille écus, en songeant, dit-il à Philippe Iv, qu’il y avoit un roi d’Espagne au monde. Cent mille beautez médiocres mises ensemble ne valent pas, ne pesent pas, pour ainsi dire, un de ces traits qu’il faut bien que les modernes, mêmes ceux qui font des églogues, loüent dans les poësies bucoliques de Virgile. Le génie se fait sentir bien-tôt dans les ouvrages des jeunes gens qui en sont doüez, ils donnent à connoître qu’ils ont du génie, dans un temps où ils ne sçavent point encore la pratique de leur art. On voit dans leurs ouvrages des idées et des expressions qu’on n’a point vûës encore. On y voit des pensées nouvelles. On y remarque à travers bien des défauts, un esprit qui veut atteindre à de grandes beautez, et qui, pour y parvenir, fait des choses que son maître n’a point été capable de lui enseigner. Si ces jeunes gens sont poëtes, ils inventent de nouveaux caracteres, ils disent ce qu’on n’a jamais lû, et leurs