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Page:Ducharme - Journal d’un exilé politique aux terres australes.djvu/39

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D’UN EXILÉ

vail aussi dur que le nôtre sans une amélioration dans notre chétive nourriture etc. — La réponse des autorités fut que c’était la ration allouée aux prisonniers et que nous avions à nous en contenter. Enfin nous fûmes tenus tels que les forçats les plus criminels, à faire les mêmes travaux qu’eux, porter le même costume qu’eux, enfin sujets aux mêmes punitions. Après huit à neuf mois d’une vie si misérable, Son Excellence, Sir George Gipp, arrêta pour s’informer de nous. Par un heureux hazard notre surintendant était bien disposé et fit de nous un rapport favorable. Nous en profitâmes pour le prier de demander à Son Excellence la permission de différer un peu le moment de notre réclusion après les travaux de la journée. Il nous accorda une heure de plus. Peu de temps après cet événement, notre surintendant pensa à tourner nos services à son profit plutôt qu’à celui du gouvernement ; et en conséquence il nous employa le plus souvent à travailler pour lui-même au préjudice du gouvernement et retirait tout le fruit de nos travaux. Mais, comme on le prévoit bien, nous n’y perdîmes pas ; il fallut nous porter au silence sur cette fraude par de petits privilèges. Quant à nous, il nous importait peu de travailler pour le gouvernement ou qui que ce fut, n’étant responsables que de l’obéissance à notre surintendant et ne pouvant apporter quelqu’adoucissement à notre situation qu’à force d’entrer dans ses intérêts et de flatter ses inclinations. Rien n’est plus naturel, qu’un prisonnier cherche à améliorer son sort ; surtout quand le gouvernement