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LES FOURRURES

pouvaient davantage soutenir la comparaison avec les Voyageurs de Pays d’en Haut, guides, timoniers, canotiers, portefaix, coureurs et trappeurs de colossale renommée. Dans la crainte de sombrer, elle se mit à recruter, elle aussi, des serviteurs Canadiens français, et à s’avancer vers l’Ouest, à mesure qu’elle parvenait à équiper ses convois.


Une suite de combats sanglants, de voies de fait, d’excès abominables marquèrent les quarante années de cette concurrence. Le désert en a enseveli le souvenir. Le tort que se firent réciproquement ces ambitieux de la fortune fut tel, qu’au milieu d’une abondance inouïe de fourrures, les deux sociétés touchèrent à l’heure de la ruine. Le prétexte invoqué de leurs querelles était le reproche d’invasion sur le terrain d’autrui : « Vous êtes sorti du domaine de votre charte », disait la Nord-Ouest à la Baie d’Hudson. « Le pays est anglais, et vous n’êtes que Français », répliquait la Baie d’Hudson.

« Il est plus facile de s’embrasser que de se convaincre ». C’est ce que firent les deux rivales, au plus fort de la bataille, en 1821.

Pendant qu’au fond du Nord, commis et engagés, hors d’atteinte des bonnes nouvelles pour une année encore, continuaient à s’entre-détruire, les têtes de Montréal et de Londres se rapprochaient et se confondaient. Les capitaux furent mis en commun, les personnels respectifs conservés, tous les établissements maintenus, les meilleurs articles des règlements amalgamés, et les deux organisations unifiées en un corps parfaitement articulé, solide, et resté indestructible jusqu’à nos jours, sous le vocable d’Honorable Compagnie de la Baie d’Hudson[1].

  1. Pendant cinquante ans, l’Honorable Compagnie s’enrichit d’un monopole, qu’elle eut, de droit d’abord, de fait ensuite, dans les Pays d’en Haut.

    En 1869, le gouvernement canadien lui acheta un domaine de deux millions et demi de milles carrés, pour en former les provinces actuelles du Manitoba, de la Saskatchewan, de l’Alberta et de la Colombie anglaise, ainsi que les Territoires. Il lui versa une indemnité de 7,500,000 francs et lui laissa de très vastes réserves de terrain dans toutes ces provinces. La Compagnie, bien que dépouillée du monopole de la traite, continua longtemps à tuer, de par la force établie de son système, maintes petites concurrences.

    Nombre de touristes d’un été dans les régions arctiques ont proclamé