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Page:Duchaussois - Aux glaces polaires, Indiens et Esquimaux, 1921.djvu/450

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Le Père Rouvière note plusieurs fois cette propension au larcin, et se plaint d’en avoir souffert. Récemment, le Père Frapsauce, son successeur, nous écrivait, du bord de l’océan Glacial :


… Il y en a un bon nombre que vous ne croiriez pas malhonnêtes, car ils semblent francs et ils sont bons chasseurs, ne manquant de rien : ils volent partout, tant qu’ils le peuvent… Des deux maisons qu’avaient nos regrettés pères, les Esquimaux n’ont laissé que les murs. Tout le reste fut emporté. Ils ont arraché jusqu’au moindre clou. Le fer, un bout de fer, pensez donc ! Ils iront le chercher à n’importe quelle distance, et au prix de tous les efforts. Ils renverseraient une maison pour prendre le fer qu’ils sauraient être dans les fondements. Mettez dans la maçonnerie de votre cheminée un morceau de fer pour tenir votre crémaillère : nos gaillards, en votre absence, démoliront la cheminée, pour se l’approprier… Ils n’y vont pas toujours aussi brutalement. Un ami me racontait qu’il se trouvait en voyage de découverte, à l’est du Grand Lac de l’Ours. Des Esquimaux se présentèrent ensemble pendant qu’il était sous sa tente. Un moment après, on vint lui vendre des peaux de rennes, qu’il jeta derrière lui, à mesure qu’il les payait en plomb, poudre, thé, tabac, linge, etc… D’autres vendeurs arrivèrent, sans interruption, offrant toujours des peaux de rennes, et, de la sorte, jusqu’à épuisement du stock d’échange. Alors les Esquimaux qui remplissaient la tente et ses abords se retirèrent tous, avec force salutations gentilles, auxquelles mon ami, reconnaissant et touché, répondait de son mieux. Le dernier sorti, le Blanc se retourna, la main tendue pour saisir et compter son butin… Plus de peaux ! Plus une seule ! Les coquins étaient tous de connivence : tandis que les uns amusaient le pauvre acheteur, les autres sortaient, et, soulevant les bords de la tente, en arrière, en retiraient continuellement les bienheureuses peaux, pour venir triomphalement les revendre deux, trois, quatre fois… Tant pis également pour les caches laissées en route, fussent-elles la propriété de la plus terrible des gendarmeries. Ils pillent sans merci tout ce qu’ils flairent… »


Les mauvais Esquimaux ne reculent pas devant le meurtre pour satisfaire cette cupidité.

Et ils emploient, à frapper leur victime, la froide adresse apprise dans les longues heures d’affût et de ruse, au bout desquelles ils parviennent à harponner le morse farouche. Ils savent attendre et patienter. Le moment venu, ils portent le coup fatal, dans le dos toujours.

Livingstone, officier de la Baie d’Hudson, venu pour éta-